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Page:Revue historique - 1896 - tome 62.djvu/53

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qui tenait, disaient-ils, « le roi sous son pied[1]. » Non seulement ils s’allièrent avec les ducs de Berry, de Bretagne, de Bourbon, avec les comtes d’Alençon et d’Armagnac[2], mais avec Henri IV d’Angleterre. Henri leur donna des troupes comme il en avait donné au Bourguignon. Cependant Thomas de Lancastre, duc de Clarence, propre fils du roi, qui les conduisait, débarqua trop tard en France ; il n’y descendit que le 10 août 1412, alors que les princes avaient fait la paix dès le 12 juillet. Furieux d’être inutile et craignant de n’être pas payé, Clarence ravagea tout sur son passage. Finalement, après un mois de pourparlers, les ambassadeurs de Charles d’Orléans consentirent aux conditions suivantes : les Anglais rentreraient chez eux avant le 1er janvier 1413 (n. st.), sans pillage aucun sur leur route. Ils recevraient 150,000 écus pour leurs gages et comme indemnité. Cette somme serait garantie par des joyaux, dont un seul, la croix de Berry, était prisé 40,000 livres ; surtout par sept otages qui seraient remplacés en cas de décès et délivrés au fur et à mesure des paiements[3].

De ces sept otages, le plus illustre était Jean d’Orléans, comte d’Angoulême. Il avait douze ans seulement[4]. Les six autres étaient de simples serviteurs de la maison du duc Charles, son frère, — Guillaume le Bouteiller, Archambaud de Villars, Hector de Pontbriant, Jean Davy, — ou de la sienne, Macé le Borgne, Jean de Saveuzes. Ni Berry ni Bourbon n’avaient proposé aucun de leurs gens comme otage.

Ce fut là le traité de Buzançais : il fut scellé, le 14 novembre 1412, par Clarence, York, Dorset, d’une part ; Tignonville, Braquemont, Gaucourt, de l’autre[5].

Ainsi, la mort violente de Louis de France et le défaut de raison saine, d’énergie royale, chez Charles VI ; les hostilités des princes et

  1. Arch. nat., K. 56, no  18. Ces mots se trouvent dans le manifeste des princes d’Orléans (juillet 1411).
  2. Par le traité de Gien du 15 avril 1410. L’original est à Londres (British Museum, Addit. charters 7926) et porte les six signatures autographes des princes : Berry, Bretagne, Orléans, Bourbon, Alençon, Armagnac. Cf. Geste des nobles (éd. Vallet), p. 130. — Juv. des Ursins (éd. Godefroy), p. 203-206. — Chron. anon. (D. d’Arcq, Monstrelet), VI, 204. — Pierre Cochon, Chronique normande (éd. de Beaurepaire, Soc. hist. de Norm.). Rouen, 1870, in-8o, p. 247-248. — Bibl. nat., Pièces orig. 985, no  21976, p. 75.
  3. Arch. nat., K. 57, no  28. Original du traité de Buzançais, 14 novembre 1412.
  4. Jean d’Angoulême nous paraît être né en 1399, entre le 1er mai et le 7 août. Cf. notre article sur l’établissement de cette date, Bibl. de l’École des chartes, 1895, t. LVI, p. 318-327.
  5. Texte du traité cité suprà. Nous retrouverons plus loin chacun de ces personnages.