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engagements ; vers la fin de l’année 1442, il passait la mer et arrivait à Cherbourg, où l’on chargea de sa garde Thomas Gower, commandant de la ville pour Somerset[1]. De là, le comte vaqua plus aisément aux dernières négociations de sa délivrance.

Elles durèrent quinze longs mois, que ne purent écourter les cadeaux du comte à son maître[2]. Jamais cependant les circonstances n’avaient servi mieux les intérêts et les vœux d’Angoulême. Somerset laissait voir des dispositions bienveillantes[3] ; il cédait volontiers à l’influence de Suffolk et il lui avait confié le soin de conduire les négociations avec Dunois[4] ; or, le plus ferme désir de Suffolk était d’obliger le Bâtard ; tous deux enfin, Dunois et lui, avaient maintes occasions de se voir et de s’entendre au sujet des pourparlers pour la paix générale que Suffolk avait reçu la mission de traiter en France.

Le 12 mai 1444, Suffolk promit la liberté au comte, en retour de 12,000 salus d’or payés comptant ; de 65,000 autres salus, garantis au moyen de scellés par les ducs d’Orléans, d’Alençon, de Bourbon, le comte de la Marche, le sire de Lohéac, Dunois ; d’une croix de prix laissée en gage[5].

Jean se réjouissait, quand la mort de Somerset menaça soudain de traverser ce beau dessein[6]. — Angoulême eut l’énergie de ne pas s’abandonner. De Tours jusqu’en Angleterre, il fit accompagner Suf-

  1. Arch. nat., J. 919, 5, fol. 8 vo, 9 ro ; J. 919, 25, fol. 22 vo. — Sur Somerset et ses piètres talents militaires, voy. Beaucourt, III, 28-29, et surtout Arch. nat., K. 68, 19 (ses dilapidations en Normandie), etc… Gower était déjà en 1439 lieutenant de Cherbourg pour Somerset, Bibl. nat., Pièces orig. 1383, no  31222, p. 8 ; Moreau, Chartes et Dipl., vol. 252, p. 100 et suiv. — Henri IV avait donné le titre de duc à Somerset, Arch. nat., K. 67, no  21111 ; cf. suprà, p. 7 et no  123, etc.
  2. Notamment 20 pipes de vin. Arch. nat., K. 64, no  3717.
  3. « Le duc de Sommercet, lequel de sa grâce je treve très bienveillant à ma délivrance, » écrit le 9 avril [1444, n. st.], de Cherbourg, Jean d’Angoulême à Charles d’Orléans, Arch. nat., K. 64, 3717, cit. Somerset avait hâte de délivrer les otages auxquels il s’intéressait.
  4. Même lettre : « Je sçay de vray que mon maistre, le duc de Somerset, se fie moult au… conte de Southfolk. » Arch. nat., K. 72, 5615, et J. 919, 25, fol. 9 ro et suiv. — Bibl. nat., fr. 2811, fol. 19, publiée assez exactement Rev. doc. hist., 1877, p. 21, par Ét. Charavay.
  5. Rev. doc. hist., 1877, p. 21, cit. — Arch. nat., K. 72, 565 ; J. 919, 25, fol. 9 ro et suiv. — Jean II, duc d’Alençon (1409-1476), avait épousé Jeanne, fille de Charles d’Orléans, morte en 1432. Charles Ier de Bourbon vécut de 1401 à 1456. Bernard, mort vers 1462. Lohéac-André de Laval, amiral et maréchal de France (P. Anselme, VII, 73 e).
  6. Jean d’Angoulême déclara le traité « très bon, » Charavay, op. cit., p. 22-23 en note. — Mort de Somerset (Dugdale, II, p. 123, col. 1), le 27 mai 1444.