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Page:Revue maritime et coloniale, tome 18.djvu/469

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d’or de Bambouc ; M. de Moras[1], commissaire du Roi près de la Compagnie, engagea le Sr Pelays, par ordre de M. Orry, à faire ce voyage ; il monta jusqu’en Galam, où il fut massacré par les Nègres, avec plusieurs personnes de sa suite : cette mort fit échouer sa mission, mais elle donna une plus grande connaissance de la quantité et de la richesse de ces mines. Assuré de ce point important, et me flattant de ne pas faire les fautes du Sr Pelays[2], dont la mauvaise conduite avait fait prévoir la mort à l’avance, je formai secrètement le dessein de suivre ce même projet. Je commençai par employer deux années entières à effacer les mauvaises impressions que les écarts du Sr Pelays avaient laissées dans le pays ; j’y établis des correspondances et des relations particulières avec plusieurs princes Foules et Maures dont je pouvais avoir besoin. Le roi de Farbana avait déjà envoyé son fils aîné au Sénégal, pour assurer les Français de sa bienveillance ; il y séjourna quelque tems pour se reposer de son voyage (il venait de 350 lieues). Après quoi il fut renvoyé avec des présents d’une très-médiocre valeur pour nous, mais qui firent un grand bruit à la cour de son père et chez tous ses voisins.

Mes arrangements politiques étant faits et mon plan dressé,vje partis du Sénégal et j’arrivai en France en 1742 ; je communiquai le tout à M. Orry et à M. de Fulvy son frère, commissaire du Roi à la Compagnie. Je ne dirais pas après leur mort à quel point ils en furent satisfaits et les louanges qu’ils y donnèrent,

  1. Père du personnage de ce nom, ministre de la marine.
  2. Pelays, envoyé premièrement par la Compagnie des Indes dans le pays de Bambouk, avait apporté de la terre de la mine de Natacon. Contente de l’épreuve qu’elle en avait fait faire,la Compagnie avait renvoyé Pelays pour exploiter ces mines.— Mais celui-ci ne sut pas ménager l’esprit des peuples parmi lesquels il allait s’établir, se faisant traiter en roi par les rois nègres. Cette mauvaise conduite donna lieu non-seulement à la rupture de la paix, mais encore au massacre qu’ils firent de ce directeur et de plusieurs officiers attirés à Dramanet sous le prétexte de la paix. Dramanet était le village où se tenaient ordinairement les quatre grands du pays, et situé à trois quarts de lieue de Galam. Les grands de Dramanet voulaient, disaient-ils, cimenter la paix devant tout le peuple pour la rendre plus durable. — Flatté des promesses que lui faisaient les nègres de le laisser s’établir, autant qu’ébloui par les présents qu’ils lui adressèrent par leurs ambassadeurs, Pelays accepta de se rendre à Dramanet, où sa mort était résolue ainsi que celle de ses compagnons, Pierre Luc et Pellegrin. « La bienséance, dit un de nos manuscrits, ne permet pas de décrire le genre de mort que ces grands firent souffrir au sieur Pelays et à ses officiers ; ils attachèrent sa tête au bout d’une perche qu’ils exposèrent sur le lieu le plus élevé pour être un monument de leur victoire sur les Français. »