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Page:Revue maritime et coloniale, tome 18.djvu/568

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idée aussi généreuse. Aussi les premiers appels faits aux pères de famille pour peupler l’école furent-ils considérés par ceux-ci comme un mode de recrutement militaire ; les chefs de village levèrent des enfants comme on lève un impôt, et les parents des jeunes élèves reçurent une certaine somme comme indemnité ; de sorte que, loin de payer l’instruction que recevaient leurs enfants, ils étaient, au contraire, payés pour les-laisser instruire. Mais les choses ont bien changé depuis cette époque, et peu de temps après la création de l’établissement, on dût l’agrandir ; les principales familles de notables sollicitèrent vivement l’admission de leurs enfants comme une faveur et un honneur ; et maintenant, malgré la sollicitude toute particulière de l’administration, l’école de l’évêque d’Adran ne peut recevoir tous les enfants qui se présentent.

Devant le collège des Missions est une maison de sombre apparence, surmontée d’une petite croix de pierre déjà noircie par le temps, et n’ayant qu’une seule ouverture. Cette maison renferme des carmélites, venues en Cochinchine pour s’y livrer à la vie contemplative, y prier, y souffrir et y mourir ! Malgré l’austérité de leur règle, on trouve chez les carmélites plusieurs postulantes indigènes qui aspirent au bonheur de devenir les épouses mystiques du Seigneur. Déjà quelques-unes ont été jugées dignes de revêtir les humbles habits de la pénitence, et ont échangé avec joie la liberté presque illimitée dont jouissent les femmes annamites contre une réclusion absolue.

Quittons ce cloître et livrons-nous au plaisir de visiter le joli couvent de la Sainte-Enfance et sa délicieuse petite chapelle, surmontée d’une flèche élégante dominant toute la contrée, et annonçant au voyageur la capitale de la France orientale. Une croix couronne cet édifice, et, à côté, le pavillon français semble protéger le signe sacré de la civilisation.

Le couvent rappelle l’architecture italienne, à laquelle se mêlent les caprices de l’ornementation annamite. La chapelle, de style gothique, est également chamarrée de peintures d’un goût douteux, que le temps et la pluie se chargeront d’effacer.

Tout cela est l’œuvre d’un prêtre annamite (un Tonquinois), architecte improvisé qui, dans études préalables, conçut et fit exécuter le plan de ce bel établissement ; et delà, dit-il, pour la plus grande gloire de Dieu. « La foi transporte les montagnes. »

Disons deux mots de l’œuvre.

L’institution de la Sainte-Enfance, la plus utile, la plus mo-