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Page:Revue maritime et coloniale, tome 18.djvu/574

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Parmi les tombeaux rôdent des troupeaux de vautours, animaux immondes que la nature semble avoir créés pour débarrasser le sol des immondices et des cadavres, et qui remplissent parfaitement la haute mission d’hygiène et de salubrité publiques qui leur a été dévolue.

Cette plaine est traversée par deux routes assez fréquentées ; une partie sert de champ de manœuvre aux troupes de la garnison de Saigon.

Le plateau situé entre Saigon, l’arroyo de l’Avalanche et la plaine des tombeaux, est occupé par plusieurs villages ; celui de Yong-Guiton, situé à l’intersection du boulevard Chasseloup-Laubat et de la route de Tong-kéou ; ceux de Phu-hoa, Han-hoa, Hiep-hoa, groupés près du troisième pont de l’Avalanche qui les fait communiquer avec le grand village de Phu-nhuàn ; celui de Banian, situé tout près de Saigon, à quelques centaines de mètres de la citadelle ; enfin le village de Tourane, élevé par des chrétiens qui, lors de l’évacuation du port de Tourane, ont suivi les Français à Saigon, et ont reçu des terres sur lequel ils ont bâti ce village auquel ils ont donné le nom de la patrie absente. Ces infortunés n’ont cessé de nous être dévoués et utiles ; ils sont énergiques, habiles, et fournissent de nombreux travailleurs aux établissements de la ville.

Les autres villages cités sont aussi habités en grande partie par de pauvres indigènes de l’intérieur que la guerre a forcés de venir se réfugier autour de nous.

Près du village de Tourane se trouve le cimetière des Français, autre Plaine des Tombeaux, où reposent déjà tant de nos frères d’armes !

La plaine de Saigon est riante ; de grands arbres, échappés à la cognée de nos soldats, en font une promenade très-agréable, surtout dans les premiers mois de l’année, alors que les faux flamboyants (genre Erythrina), dépourvus de feuilles, couverts de fleurs d’un rouge vif, en grandes panicules dressées, charment la vue par leurs dômes de feu. À cette époque de l’année, les environs de la pagode Barbet[1], qui touche à Saigon, sont magnifiques.

  1. Pagode Khai-tù-ô-ng (aurore des présages), élevée par ordre de Minh-mang, fils et successeur de Gia-long, sur l’emplacement même qu’occupait une case où il est né, dans un carrefour, près de la citadelle, pendant la guerre des Tay-son. C’est près de cette pagode que le capitaine Barbet a été assassiné. De là son nom actuel.