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Page:Revue maritime et coloniale, tome 18.djvu/790

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rieux fut celui de la pagode des Clochetons. Pendant une nuit entière, du 3 au 4 juillet 1860, cinquante Français et cent Tagals, sous le commandement des enseignes de vaisseau Narac Gervais et du capitaine espagnol Hernandez, y résistèrent héroïquement aux attaques de l’armée ennemie. Enfin le traité de Pékin mit un terme à cette situation difficile en permettant à l’amiral Charner, alors commandant en chef, de ramener toutes ses forces en Cochinchine pour un coup décisif, qui fut la bataille de Kihoa. Il suffit de rappeler le nom de ce brillant épisode de la conquête, qui a été raconté ici même par un témoin oculaire[1]. Le succès de cette affaire capitale tranchait définitivement la question en notre faveur.

Les lignes de Kihoa avaient été emportées au mois de février 1861. Deux mois après, l’expédition de Mytho, habilement conduite par l’amiral Page, plaçait en notre pouvoir les bouches du Cambodge et la seconde ville de la Basse-Cochinchine. Dans le Nord, le pays avait été occupé sans résistance jusqu’à Tay-ninh. La saison des pluies, qui règne d’avril en octobre et paralyse pendant six mois toutes les opérations militaires, vint mettre un temps d’arrêt à cette série de victoires. Il était réservé à l’amiral Bonard, successeur de l’amiral Charner, de la continuer par la prise de Bien-hoa au mois de décembre suivant ; ce fut là que les mandarins, fidèles à leurs traditions barbares, laissèrent périr dans les flammes des centaines d’Annamites chrétiens, enchaînés au milieu de matières combustibles auxquelles ils firent mettre le feu en s’éloignant. Enfin en mars 1862 l’occupation de la citadelle de Vinh-long, sur la rive droite du Cambodge, acheva de nous rendre maîtres de tous les points principaux du pays. Tandis que nous marchions ainsi de triomphe en triomphe, une diversion inattendue dans le Nord venait hâter la solution des événements, et surmontait les dernières résistances de l’opiniâtre et malheureux Tu-Duc. Une grave insurrection en effet se déclarait au Tonkin vers le commencement de 1862. Dès le début, le prince Lé, prétendant au trône et descendant de l’ancienne famille royale d’Annam, réussissait à s’emparer de quatre provinces, et ses progrès étaient si rapides qu’il menaçait peu après Kecho, la capitale du pays. Tu-Duc n’avait personne à lui opposer ; toutes ses forces étaient employées de notre côté. De plus la récolte de riz venait de manquer et lui faisait sérieusement craindre une

  1. Voyez, dans la Revue des Deux Mondes du 15 novembre 1862, l’intéressant travail de M. Pallu sur la Campagne de Cochinchine.