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parti de renforcer ou mieux de prolonger cette ligne, il lance dans la direction convenable des fractions de son gros auxquelles il assigne une zone de marche déterminée. Chaque colonne cherche dans son secteur des cheminements qui lui permettent d’avancer à couvert des vues de l’ennemi. Elle se glisse ainsi dans les formations les moins vulnérables, se faufilant sous bois, rasant les murs, profitant des haies, des talus, des thalwegs, pour se dissimuler.

On pourra trouver que c’est lui imposer sans utilité un surcroît de fatigue que de la lancer dans les terres labourées et de lui faire prendre, avant même que sa présence ait pu être dévoilée, une formation incommode pour la marche, qui n’a d’autres objets que de diminuer sa vulnérabilité et de faciliter son entrée en action lorsqu’elle arrivera sur la ligne de feu. Mais il ne faut pas oublier que les rafales de l’artillerie à tir rapide sont toujours à craindre. Bien que le Règlement français persiste à proscrire les feux qui n’ont pas un objectif nettement défini, il faut s’attendre à voir les batteries couvrir d’obus un terrain simplement suspect. Le moindre indice, l’étude de la carte, un renseignement provenant d’un espion ou d’un prisonnier, sinon recueilli par des aérostiers, déterminera la défense à battre de temps en temps, à intervalles irréguliers, le versant opposé de telle colline dont elle voudra rendre le faite inabordable.

Pour riposter à cette artillerie, l’attaque tiendra des batteries prêtes à entrer en action. Chaque colonne d’infanterie sera donc accompagnée de canons qui se déplaceront dans le secteur de marche qui lui est attribué. Un certain nombre d’entre elles se mettront « en garde » de façon à contrebattre immédiatement toute batterie adverse qui viendrait à se démasquer, ou à bombarder tous les couverts d’où semblerait partir une fusillade dangereuse.

Grâce à cet appui, l’infanterie lancée en avant arrive à se mettre en ligne avec celle qui est déjà en action. Pour venir jusque-là, il lui aura fallu franchir parfois des espaces découverts, à quoi elle n’aura réussi qu’en exécutant très rapidement les bonds très courts, avant que l’ennemi ait eu le temps de se reconnaître. Une fois postée, elle met tous ses fusils en ligne, le feu de l’artillerie se superposant à celui de l’infanterie. En d’autres termes, et c’est là une des caractéristiques des idées nouvelles, on ne garde pas de réserve immédiate.