Aller au contenu

Page:Revue pédagogique, année 1925.djvu/309

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
299
Mme PAULINE KERGOMARD

tanee était telle que la réformatrice n’avait pas tort, pour la briser, d’user de toutes les ressources de son autorité, comme elle usait de toutes les ressources de sa verve et de son esprit. Si nous avouons qu’aujourd’hui encore on rencontre des écoles maternelles qui n’ont pas détruit leurs antiques gradins, qui ne pratiquent guère les règles de l’hygiène et qui conservent une prédilection marquée pour les procédés mnémotechniques et livresques, comment ne serions-nous pas reconnaissants à Mme Kergomard d’avoir mené si rude campagne contre une ennemie aussi tenace que la routine ?

Non moins rude fut la campagne qu’elle dut mener contre les ’préjugés. Croirait-on que de violents articles furent écrits contre elle, dans des journaux de province, parce qu’elle avait osé dire, en conférence pédagogique, que les mères doivent laver non seulement la tête et les mains, mais tout le corps de leurs enfants ? Croirait-on qu’elle fut accusée d’immoralité pou avoir prescrit de démolir la haute barrière qui, dans les salles d’asile, séparait les petits garçons des petites filles ? Il faut bien reconnaître que, depuis cette époque, qui n’est pourtant pas très éloignée, l’opinion publique a fait quelques progrès. Mais ces progrès ne sont-ils pas dus à des propagandes courageuses comme celle de Mme Kergomard ?

Ces luttes n’épuisaient pas son activité : elle souhaitait en employer la meilleure part à des tâches plus positives. Comme quiconque place très haut son idéal, elle ne croyait jamais l’avoir atteint ; à peine un progrès était-il réalisé qu’elle entreprenait une nouvelle conquête. Son grand regret fut de n’avoir pas réussi à créer un corps d’institutrices spécialisées dans l’éducation maternelle. De même que « l’école maternelle n’est pas une école au sens ordinaire du mot », l’institutrice maternelle n’est pas une institutrice au sens ordinaire du mot. Elle doit acquérir des connaissances précises en hygiène et en physiologie ; elle doit étudier la psychologie de la première enfance ; elle doit apprendre l’art de parler aux petits, l’art de raconter ; elle doit savoir chanter, mener une ronde, dessiner au tableau des scènes vivantes, fabriquer des jouets. Mme Kergomard a souvent recherché le moyen de former des maîtresses possédant tous ces talents. Et, dans un mémoire de 1917 qu’elle