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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1879.djvu/335

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REVUE PÉDAGOGIQUE.

des anciens ; on n’admet pas comme eux le sacrifice de toute liberté individuelle à la prospérité publique, ou plutôt on croit qu’un large exercice de cette liberté y contribue grandement. Il importe certainement à une nation de trouver des jeunes gens robustes pour en faire des soldats, et la bonne constitution des jeunes gens dépend en partie des soins donnés au développement de leur corps pendant l’enfance. Mais aujourd’hui l’État n’intervient point au milieu des familles, afin de leur imposer ces soins : il s’en remet au dévouement des hommes instruits pour répandre dans le public des idées justes sur l’hygiène, à l’intelligence des parents pour les comprendre, à leur affection pour les mettre en pratique. Il peut constater chaque jour les progrès réalisés par cette science, sans se faire illusion toutefois sur ce qu’il existe encore à cet égard de préjugés absurdes, de négligence, et même de mauvaise volonté. Mais s’il essayait d’intervenir à chaque moment de la vie domestique pour faire triompher ce qu’il croit être, et ce qui est en effet le bien, cette immixtion perpétuelle dans les détails de la vie privée semblerait à tous un insupportable despotisme. Encore, à la rigueur, pourrait-on le supporter pour ce qui regarde les prescriptions de l’hygiène : car l’hygiène est une science, et ses lois sont à peu près universellement admises. Mais pour ce qui touche à la morale, comment admettre la prétention de l’État à former le caractère, les habitudes, les sentiments de l’enfance, d’après un système préconçu, qui peut changer avec le gouvernement lui-même ? Bien des gens s’insurgent à notre époque contre la tyrannie des programmes d’enseignement. imposés par l’État dans les écoles qu’il entretient, tyrannie qui arrête, dit-on, l’initiative des maîtres, et qui ne procure même pas aux enfants l’avantage de la stabilité des métho-