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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1881.djvu/288

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REVUE PÉDAGOGIQUE

Badjard-ben-Unçar-ben-Abibekr-ben-Omar-Latneci[1]. » Berbère d’origine, puisqu’il appartient à la tribu des Sanhadja, il naquit dans le village d’Arawân, au nord-ouest de Tombouctou, vers la fin de l’année 1556 : c’est du moins ce qu’il déclare, contrairement à l’usage de ses coreligionnaires, en disant qu’il a vu la date de sa naissance écrite de la main de son père.

En 1593, Ahmed, sultan du Maroc, ayant envoyé le général Mahmoud Zergoun, à la tête d’une armée, pour soumettre la Nigritie, celui-ci s’empara de Tombouctou et y fit reconnaître la souveraineté de son maître. Le cheikh Ahmed-Baba, alors âgé de trente-sept ans, était l’homme le plus instruit du pays. Il demanda à ses concitoyens quel était le monarque auquel ils venaient de jurer soumission. — C’est, lui répondit-on, le sultan du Maroc. — Eh bien, moi, je ne connais pas d’autre souverain en Occident que le roi de Tunis, répliqua Ahmed-Baba. On voit, remarque à ce sujet Ibn-abi-Dinar, que ce savant avait des notions sur l’histoire de la Tunisie, bien que son pays dépendit plutôt du Maroc par sa position géographique. Quoi qu’il en soit, Ahmed-Baba fut cruellement éprouvé dans cette circonstance : car il eut la douleur de se voir transporter, les fers aux pieds, à Merrakech, le premier jour de ramadhan, avec une partie de sa famille. Ce ne fut que quatre ans plus tard qu’il lui fut donné de voir tomber ses chaînes. Au rapport du chroniqueur El-Marrakechi, la joie que fit éclater sa délivrance dans le cœur des vrais croyants fut unanime. En effet, à peine arraché à une obscure captivité, ce nègre, en qui ses

  1. J’ai tenu à enregistrer cette longue généalogie, afin de faire connaître des noms appartenant à la race berbère.