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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1885.djvu/570

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REVUE PÉDAGOGIQUE

L’herbartianisme en Allemagne. — La pédagogie de l’autre côté du Rhin est engagée en ce moment-ci dans une lutte assez vive dont nous ne pouvons pas ne pas entretenir nos lecteurs.

Le monde des instituteurs germaniques, tant de l’Allemagne proprement dite que de l’Autriche et de la Suisse, se partage à l’heure actuelle en deux grandes catégories. D’une part, les disciples de Herbart, qui se subdivisent à leur tour en deux tendances, l’une modérée ou libérale, l’autre orthodoxe et intolérante ; la première reconnaissant pour chef le Dr Stoy, la seconde se rattachant au Dr Ziller. D’autre part, la grande masse des instituteurs et pédagogues qui, pour des raisons diverses, n’ont pas pris parti pour Herbart, et que les fanatiques de ce philosophe traitent de « pédagogues vulgaires » ou de « simples praticiens ». Ceux-ci se rattachent assez volontiers à Frédéric Dittes, l’ancien directeur de l’école normale supérieure de Vienne et le rédacteur en chef du Pædagogium, l’une des meilleures revues pédagogiques allemandes.

Des deux côtés, c’est depuis quelques années un flot intarissable de brochures, de volumes, d’articles de revues et de journaux. Dittes conduit la bataille avec une grande énergie ; il est vigoureusement attaqué à son tour, et peu d’instituteurs restent étrangers au conflit ; ils se croient à peu près tous obligés de se ranger sous l’une ou l’autre bannière.

Le nom de Herbart (1776-1841) est à peu près inconnu en France ; aussi commencerons-nous par dire quelques mots de ce philosophe. Précepteur en Suisse de 1797 à 1799, il y apprit à connaître Pestalozzi, subit son influence et recueillit quelques-unes de ses idées. C’est à Pestalozzi, par exemple, qu’il a emprunté sa théorie que l’intuition doit être la base de l’enseignement. Il a puisé ses autres doctrines chez les « Philanthropinistes » et dans les ouvrages de Niemeyer, principalement dans le livre classique : « Les principes de l’éducation et de l’enseignement. » Devenu professeur de philosophie à Gœættirgue et à Kœnigsberg, Herbart a fait des Iccçons et publié des livres de pédagogie, d’abord peu lus, peu connus, qui n’avaient pas du tout attiré l’attention du public spécial de l’enseignement. Dix ans même après sa mort, on pouvait les croire tombés dans la mer de l’oubli. Il appartenait à deux maîtres distingués de les retirer de cette obscurité profonde, et de provoquer en faveur des idées de Herbart un mouvement considérable.

Voici un court résumé de ces idées — plus fidèle peut-être que clair :

1. L’éducation repose sur le double fondement de l’éthique ou morale et de la psychologie.

L’éthique propose le but de l’éducation, qui est la formation chez l’homme d’une volonté morale.

La psychologie, en tant que doctrine des phénomènes, des lois et causes de la vie de l’âme, indique les voies et moyens pour parvenir