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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1887.djvu/504

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REVUE PÉDAGOGIQUE

un enseignement des indigènes. L’opinion publique a fait un progrès décisif à cet égard. Les controverses mêmes engagées à ce sujet dans la presse algérienne ont tourné à l’instruction de tous. Les députés et les sénateurs, il faut leur en savoir particulièrement gré, n’ont pas hésité à éclairer leurs électeurs et à soutenir la proposition de M. Thomson en faveur de l’enseignement indigène. En somme, l’instinct de bienveillance et de générosité qui nous est inné, et que de tragiques événements ont pu momentanément étouffer, a décidément repris le dessus, et beaucoup de braves colons algériens qui ne voudraient pour rien au monde être traités « d’arabophiles » ne tardent pas à vous laisser voir, quand on cause un peu plus familièrement, qu’eux aussi ils veulent du bien aux Arabes, et le premier bien de tous, l’instruction.

III

Essayons maintenant de comparer les procédés pédagogiques que les deux pays ont mis en œuvre et de faire connaître en quelque sorte leur plan de campagne.

Instruire une population indigène, c’est avant tout lui apprendre notre langue. Mais comment apprendre le français collectivement à des classes entières toutes composées d’enfants qui n’en savent pas le premier mot ? Là est le problème. On a cru le résoudre d’abord en rapprochant sur les mêmes bancs les enfants indigènes et les nôtres. C’est le séduisant système des écoles arabes-françaises, un plan d’études commun pour les deux groupes d’élèves, une sorte de classe bilingue où les Arabes apprendraient le français et les Français l’arabe par la pratique, dans la classe et plus encore dans la récréation.

Ce serait en principe une excellente organisation si cela pouvait être une organisation. Malheureusement il est presque impossible de l’espérer. En entreprenant de mener parallèlement cette double éducation, on perdait de vue l’extrême différence du point de départ entre l’enfant dont le français est la langue maternelle et celui qui l’ignore. Malgré des prodiges d’ingéniosité, plusieurs de ces écoles aboutissaient à l’impuissance, et plus d’un maître a fini par désespérer d’instruire convenable-