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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1890.djvu/223

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L’INSTRUCTION PUBLIQUE DANS LA RÉPUBLIQUE ARGENTINE

Tous ces présidents ont suivi la tradition glorieuse du premier citoyen qui fut élevé à ce poste d’honneur, avant l’époque où la tyrannie brutale de Rosas vint s’abattre sur un peuple qui, malheureusement, n’avait pu acquérir la préparation nécessaire à la pratique de la liberté, je veux dire Bernardino Rivadavia, disciple des révolutionnaires français de 1789 et l’un des plus éminents hommes d’État de l’Amérique latine ; tous se sont spécialement préoccupés d’imprimer une impulsion puissante à l’instruction publique ; mais ils ont surtout donné leurs soins à l’instruction secondaire et à l’instruction supérieure. Quant à l’organisation de l’instruction primaire, qui est cependant la plus importante, elle ne date chez nous que de 1870.

En agissant de la sorte, non seulement tous ces présidents continuaient l’exemple glorieux de celui qui avait fait pénétrer la science moderne dans les écoles de théologie fondées par l’Espagne, qui avait donné à la femme une participation importante à l’œuvre de l’enseignement primaire, et qui avait employé au service de ces réformes scolaires les richesses considérables accumulées par les soi-disant apôtres d’une religion de désintéressement et de charité, richesses qui ne procuraient aucun bénéfice à la société ; mais encore ils ont obéi à une prescription constitutionnelle. En effet, la loi fondamentale prescrit au congrès national d’édicter l’ensemble des plans d’instruction générale et universitaire, et recommande spécialement aux provinces le soin de l’instruction primaire, ce qui évidemment signifie, dans l’esprit de nos institutions libérales, que l’action de ces deux facteurs, la nation et la province, doit être concordante, comme elle l’est actuellement.

Mais, soit tribut payé à la routine, soit mauvaise interprétation de la constitution, la vérité est que, en matière d’instruction primaire, à part les progrès réalisés dans deux ou trois provinces sur quatorze dont se compose la nation, le pays était plongé, il y a vingt ans, dans les ténèbres de l’ignorance, comme il fut démontré par le premier recensement général de la population fait en 1869.

Heureusement, à cette époque, la présidence de la république était occupée par un homme qui était passé maître dans les choses de l’éducation. Sarmiento, après avoir visité la France et l’Espagne, avait poussé ses voyages jusque dans la patrie d’Horace Mann, C’est