Aller au contenu

Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1891.djvu/352

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
342
REVUE PÉDAGOGIQUE

sentiment d’une fatalité plus forte que lui, incapable d’initiative, fermé à nos théories, mais en même temps sensible à l’intérêt positif, avide du gain de chaque jour, souple et de bon vouloir, quand on lui présente le travail sous la forme d’une tâche toute tracée, il l’accepte avec empressement, s’y attache, s’efforce de le bien accomplir. Le métier d’ailleurs est chez lui honoré ; il possède, avec le goût, l’adresse naturelle de la main. Les ressources seules lui manquent : la connaissance et le maniement surtout de l’outil européen qui simplifie et facilite toutes les industries.

Ouvrons donc l’école aux métiers ; transformons notre enseignement primaire en enseignement rudimentaire professionnel.

L’académie d’Alger a dressé pour l’enseignement indigène un programme fort sage, en le ramenant exclusivement à la langue française, aux éléments du calcul et de la géographie. Elle a fait plus. En assignant aux élèves trois demi-heures de travail manuel par semaine, elle ouvre la voie que nous proposons d’élargir. Au lieu de trois demi-heures par semaine, nous demandons de donner toutes les après-midi au travail professionnel en circonscrivant l’enseignement général, celui de la langue surtout, à la matinée. C’est le principe de nos écoles françaises, et elles s’en trouvent bien. Nous avons toujours remarqué que l’enfant, enclin aux travaux manuels, détendu par leur exercice, fait autant et souvent plus de progrès dans ces trois ou quatre heures d’étude du matin, que lorsqu’il passe la journée sur ses livres.

Qu’on ne s’effraie pas d’ailleurs des mots. Nous ne proposons point de prendre pour modèle, en Algérie, nos écoles professionnelles françaises, installées sur un large plan et nécessairement dispendieuses. Des rudiments de métiers suffiront ici, et on pourra se servir des ressources les plus prochaines comme professeurs, par exemple des ouvriers sur place.

L’instituteur, il est vrai, pour exercer son contrôle, devra être lui-même initié aux principes du métier. Mais à cela pas d’obstacles. Le directeur de l’école normale de Constantine, entrant chaleureusement dans l’idée, nous disait que l’installation des travaux professionnels existait déjà dans sa maison pour les élèves-maîtres indigènes, et qu’on la compléterait aisément.

Certains métiers correspondent à des besoins constants et ont