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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1892.djvu/136

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REVUE PÉDAGOGIQUE

Tiaret, pour sa population de 108,000 musulmans, elle n’a pas une école.

En comptant bien, on ne trouvera, pour toute l’Algérie, que 114 écoles indigènes, dont 53 dans la province d’Alger, 49 dans celle de Constantine, 12 dans celle d’Oran ; soit 17 dans les communes de plein exercice, 81 dans les communes mixtes 26 en territoire de commandement, En y ajoutant une trentaine d’écoles françaises où les élèves indigènes sont en nombre, on peut arriver à 150 écoles. Je ne vois comment on pourrait atteindre le chiffre de 194 énoncé à la tribune du Sénat par M. Tirman, alors gouverneur général.

Au reste, le nombre des écoles importe peu : ce qui importe, c’est celui des écoliers.

J’ai sous la main l’Exposé de la situation de l’Algérie présenté par M. Tirman au conseil de gouvernement pour l’année 1889 : j’y trouve consigné un total de 10, 415 écoliers, dont 983 filles[1]. Or la population musulmane de l’Algérie étant d’environ 3,300,000 âmes, cela fait un écolier pour plus de 300 habitants, une proportion de moins de 0.33 pour cent, tandis que la même proportion est en France de 14 pour cent, et pour la population européenne de l’Algérie de 18 pour cent. Un écolier pour 300 habitants ! Voilà tout ce que nous avons fait pour répandre notre langue et nos idées parmi ces races belliqueuses, qu’il importe si fort, non pas de nous assimiler, mais de nous réconcilier, si l’on veut assurer la sécurité et l’avenir de la colonie.

Sans doute, il y a eu un progrès depuis neuf ans. Le nombre de nos écoliers musulmans était, en 1882, de 3,172 ; en 1883, de 4,094 ; en 1884, de 4,824 ; en 1885, de 5,695 ; en 1886, de 7,341 ; en 1887, de 9,064[2]. C’est en proportion croissante. Mais comme ce progrès est lent ! Combien à ce compte faudra-t-il d’années pour qu’une fraction importante des 500,000 enfants musulmans d’Algérie ait participé à l’enseignement français ? Cela se chiffrerait par des siècles. En 1886, M. Benoist, alors inspecteur d’aca-

  1. La Statistique générale de l’Algérie pour 1890 nous donne 10,254 élèves musulmans, dont 832 filles. Pour les Français, 36,914 ; pour les Européens non français, 9,208 ; pour les israélites indigènes, 23,971. Total : 80,347, dont 35,248 filles.
  2. Bulletin universitaire de l’Académie d’Alger, février 1888, p. 77. Rapport de M. le recteur.