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SOUVENIRS D’INSPECTION

prix de l’huile et les mauvaises récoltes qui se sont succédé depuis plusieurs années ont déterminé une crise dont on souffre partout dans la montagne. Les cultivateurs sont dans la gêne ; cependant leurs sentiments pour la France n’ont pas changé et ils apprécient tous les avantages qui résultent pour eux de l’annexion.

Nombre des écoles, leur installation matérielle. Fréquentation, etc. — Depuis 1860, il n’a pas été créé moins de 28 écoles et de 17 emplois d’adjoints dans la circonscription : l’État avait ainsi pourvu à tous les besoins du moment. L’effectif d’un certain nombre d’écoles de hameau ayant diminué, on a même pu en supprimer quelques-unes ou les rendre temporaires ; par contre, l’école des garçons de Saint-Martin Vésubie devient chaque année plus nombreuse. Elle ne compte pas moins de 171 inscriptions, et elle n’a que deux classes. Un deuxième adjoint, demandé par le conseil municipal, y serait bien nécessaire…

Il serait absolument nécessaire de pourvoir les écoles les moins accessibles d’un petit mobilier personnel, destiné aux jeunes maîtres qui exercent presque toujours au début de leur carrière. On ne comprendrait dans la liste des objets à acquérir que les meubles les plus indispensables, ceux qu’il est difficile à transporter à dos de mulet[1]. Les mobiliers de quelques-uns de nos jeunes maîtres sont vraiment misérables. Le 12 novembre 1886, je visitais l’école de Doans, hameau de Saint-Étienne, situé dans une région froide, à 1,200 mètres d’altitude. L’instituteur, arrivé depuis quelques jours, n’avait trouvé aucun meuble dans les deux pièces nues mises à sa disposition : ni chaises ni tables, point de cheminée, aucun appareil de chauffage. Il n’avait, pour se couvrir, que quelques peaux de moutons qu’il avait apportées.

La fréquentation des écoles n’est pas moins régulière ici que dans les autres provinces agricoles de la France. Surtout elle n’est pas en décroissance. Les présences effectives ont été, relativement aux présences possibles, de 85 % en 1887-1888, de 86 % en 1888-1889 ; elles sont de 89 % pour l’année 1889-1890. Les absences, même pendant les mois d’hiver, sont dues à la cueillette des olives, qui ne commence qu’en novembre dans certains quartiers. Quant aux enfants que le travail des champs et la garde des troupeaux nous enlève dès le printemps, les familles en ont un tel besoin qu’elles seraient au désespoir si l’on appliquait la loi d’une façon trop rigoureuse. C’est là une des principales raisons de l’inertie des commissions scolaires, qui ne fonctionnent guère que pour dresser la liste d’inscription des enfants d’âge scolaire.

J’ai obtenu cette année que la correspondance interscolaire fût continuée par les élèves qui ont quitté momentanément l’école. Le genre d’exercice dont il s’agit plaît aux enfants ; les parents s’y intéressent. Pendant la belle saison, le lien n’est pas complètement

  1. L’administration départementale est saisie de la question et elle se préoccupe de donner satisfaction au désideratum signalé par M. l’inspecteur.