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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1910.djvu/436

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REVUE PÉDAGOGIQUE

pierre ? Sans doute, les guerres étrangères, religieuses ou civiles, ont accumulé les ruines, mais la méconnaissance ou l’indifférence en matière artistique et archéologique ont aussi causé la disparition de bien des monuments dignes d’être conservés. Entre ce qui s’est accompli en France sous ce rapport et ce qui est advenu en Italie, par exemple, le contraste est frappant. L’Italie a traversé maintes révolutions depuis le xve siècle : guerres de villes à villes et parfois, dans une même ville, guerres atroces des factions. Et cependant, rien n’a été détruit de ces époques troublées, à tel point que non seulement nous en admirons les œuvres d’art, mais les archives mêmes surabondent où sont conservés les documents avec lesquels nous reconstituons curieusement l’histoire des artistes et de leurs œuvres.

L’Italie a hérité directement du respect que lui a légué l’antiquité tout entière pour les monuments et les vieux souvenirs. Il est plaisant et presque touchant de constater, rien qu’en consultant un médaillier de pièces romaines, combien naïvement les Romains étaient attachés à leurs traditions, quelque apocryphes qu’elles fussent.

On visitait sur le Palatin la cabane d’Énée et la chaumière de Romulus. Sans doute, Cicéron qui respectait ces reliques n’y croyait guère, non plus que Caligula qui, pourtant, les fit restaurer. Dans les écoles publiques, c’étaient les hauts faits des ancêtres mythiques des Romains et ceux des héros d’Homère qu’on enseignait aux enfants, et parmi les lectures favorites de la jeunesse des écoles, Plutarque signale, avec les fables d’Ésope, les petits bas-reliefs de marbre accompagnés de légendes explicatives et comparables à nos images d’Épinal, qui interprétaient les épisodes principaux de l’épopée homérique à laquelle la nation romaine prétendait rattacher ses origines.

Quand on lit Pausanias, qui parcourait la Grèce au iie siècle de notre ère, on est frappé du superstitieux respect dont les Grecs de tous les âges avaient environné les statues qui ornaient leurs sanctuaires ou leurs places publiques, les ex-voto déposés par les générations successives dans les temples qui étaient les véritables musées de l’antiquité. La curiosité que certains de ces objets excitaient par leur vétusté, leur singularité, leur origine exotique, ne faisait que les rendre plus vénérables. Dans