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analyses. — fechner. Vorschule der Aesthetik.

plaît, que tel autre déplaît : il y a des lois qui régissent le goût et des règles pour le former. Afin d’établir quel est le beau véritable, c’est-à-dire non-seulement ce qui plaît, mais ce qui a droit de plaire, il faut examiner la valeur du plaisir procuré. L’idée du beau est donc subordonnée à l’idée du bien. Dans l’idée du beau véritable, les deux concepts du beau et du bien, d’ordinaire séparés, se rencontrent.

Quant aux rapports du bien, du beau et du vrai entre eux, Fechner a recours, pour les marquer, à l’allégorie suivante : « Le bien est le chef de maison soucieux de l’avenir, attentif à sauvegarder les intérêts immédiats et lointains. La beauté, sa gracieuse femme, soumise à sa volonté, pourvoit au présent. Le charme, son enfant, se livre au plaisir et au jeu. L’utile, leur serviteur, reçoit du pain dans la mesure où il le gagne. Le vrai, enfin, entre dans la famille en qualité de prédicateur pour éveiller les croyances, et d’instituteur pour initier à la science, dirigeant l’œil du bien, conduisant l’utile par la main et tenant un miroir devant la beauté. »

Voilà les préliminaires du livre. Quant au livre lui-même, il comprend 44 chapitres sur les sujets les plus variés : ce sont en grande partie des conférences faites au Cercle artistique de Leipzig et des articles déjà publiés dans diverses revues allemandes depuis 1839. Ces études se suivent sans ordre, sans lien. L’auteur, pour éviter des renvois trop nombreux, a même laissé subsister bien des répétitions. Dans le premier volume, nous remarquons 25 pages « sur l’unité dans la variété, » 25 autres « sur le goût, » 100 pages à peu près « sur le principe d’association esthétique, » puis des mémoires plus ou moins étendus « sur les rapports de l’utile au beau, » « sur divers essais pour déterminer la forme fondamentale de la beauté, » « sur le plaisant, le risible et le ridicule à propos de jeux de mots, de calembours, de coquilles, etc., » sur diverses lois ou conditions du plaisir, etc. — Le second volume est entièrement consacré à l’art ; citons quelques titres de chapitres : Sur la querelle suscitée entre les fanatiques de l’idée et les amoureux de la forme. En quoi l’art s’écarte généralement de la nature. Jusqu’à quelle limite l’art peut s’en écarter. Réalistes et idéalistes. Avantages respectifs de l’art et de la nature. Idéaliser. Symboliser. La beauté et l’art sont-ils affaire dépure imagination ? Du sublime. De la grandeur des œuvres d’art, en particulier des tableaux. Sur la disposition des galeries de tableaux. Sur l’architecture et la sculpture polychrome. Esthétique des couleurs. Manifestation du plaisir et du déplaisir. Principe du moindre effort, etc., etc.

Comment rendre compte d’un livre aussi varié ? Nous n’essayerons pas de rechercher l’unité que l’auteur, de son propre aveu, n’y a pas mise. Nous renonçons également à exposer les principes esthétiques de Fechner, pour la bonne raison qu’il n’en est pas un qui lui appartienne en propre et qu’il ne s’est pas soucié lui-même d’en formuler de nouveaux. Avant lui, on avait appliqué à l’esthétique la méthode expérimentale et le principe d’association. Il est le premier à le reconnaître