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stuart mill.fragments inédits sur le socialisme

du groupe lui-même, et l’on espère que, parmi les variétés des aptitudes des hommes, toutes ou presque toutes auront ce qu’il faut pour exceller dans un groupe ou dans un autre. Il faut que la rémunération du capital soit telle qu’elle suffise à encourager l’épargne sur la consommation individuelle, afin d’accroître le fonds commun jusqu’au point voulu. Le nombre et l’ingéniosité des dispositions destinées à parer aux difficultés de moindre importance, et à supprimer les inconvénients secondaires, sont très-remarquables. Grâce à ces divers artifices, les fouriéristes espèrent que les motifs personnels qui portent à agir dans l’intérêt public, au lieu de se trouver réprimés, deviendraient plus forts qu’à présent, puisque tout accroissement de service rendu amènerait une augmentation de rémunération plus sûrement qu’aujourd’hui, où l’on voit les accidents de la position exercer une si grande influence. L’efficacité du travail augmenterait, à ce qu’ils pensent, d’une façon dont on n’a pas d’exemple ; tandis que l’économie en serait prodigieusement accrue, puisqu’on détournerait vers des occupations utiles tout ce qui se gaspille aujourd’hui sur des choses sans utilité ou dommageables, et qu’on se passerait du nombre immense des distributeurs superflus, en faisant gérer par une administration unique l’achat et la vente pour la communauté entière. La liberté de choix des individus à l’égard de leur manière de vivre ne serait pas gênée plus qu’il n’est nécessaire pour tirer de la coopération dans, le fonctionnement de l’industrie tous ses avantages. Enfin, le tableau d’une société fouriériste est à la fois attrayant en soi, et il exige moins du commun des hommes qu’aucun autre système socialiste connu. Il y a lieu de désirer que ce système subisse l’essai loyal, seule pierre de touche qui permette de juger de la possibilité de mettre en pratique un nouveau système de vie sociale[1].

Le résultat de l’examen que nous venons de faire des diverses difficultés du socialisme nous conduit à conclure que les divers systèmes qui confient la gestion des ressources du pays à l’action publique au lieu de l’action privée ont droit d’être mis à l’épreuve, que

  1. Les principes du fouriérisme sont nettement exposés et vigoureusement défendus dans les divers écrits de Victor Considérant, surtout celui qui est intitulé La destinée sociale ; mais les lecteurs curieux d’études sociales feront bien de les étudier dans les écrits mêmes de Fourier. Ils y trouveront d’incontestables preuves de génie, mêlées aux fantaisies les plus étranges et les plus anti-scientifiques sur le monde matériel, et aussi des vues très-intéressantes, mais conçues à la hâte, sur l’histoire lu passé et sur l’avenir de l’humanité. Il convient d’ajouter que sur quelques questions sociales importantes, par exemple sur le mariage, Fourier avait des opinions particulières, qui ne laissent pas, il le déclare lui-même, d’être indépendantes des principes de son système industriel et en peuvent être séparées.