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ce point ni sur un autre, la loi ni la coutume d’une époque et d’un pays donnés n’a le droit de demeurer stéréotypée à jamais. Une proposition tendant à réformer des lois ou des coutumes n’est pas nécessairement condamnée parce que son adoption supposerait que, au lieu de subordonner toutes les relations humaines à l’idée qu’on se fait de la propriété au moment même, elle ferait plier les idées existantes de propriété aux nécessités du développement et de l’amélioration de ces relations. Nous ne disons pas cela au préjudice du droit que l’équité reconnaît aux propriétaires, de recevoir une indemnité de l’État pour les droits légaux de propriété dont ils pourraient être dépossédés au profit du public. Ce droit d’équité, ses fondements et ses limites, constituent à eux seuls une question que nous discuterons plus tard. Toutefois, cette condition remplie, la société a pleinement le droit d’abroger ou de modifier un droit particulier de propriété, que pour des raisons suffisantes elle considère comme un obstacle au bien public. Enfin, il est certain que la terrible accusation que nous avons vu, dans un chapitre précédent, des socialistes porter avec justice contre l’état actuel de la société, exige qu’on étudie à fond tous les moyens qui pourraient conserver à l’institution de la propriété une chance de se mettre en état de fonctionner d’une façon plus profitable à cette grande partie de la société, qui, dans le présent, jouit seulement de la plus faible partie des bénéfices directs de l’institution.

John Stuart Mill.