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regnaud.études de philosophie indienne

coercition, la libéralité et la miséricorde (damam dânam dâyam) comme des moyens de salut ou, tout au moins, de sanctification. Mais déjà, dans la Katha Up., iii, 13, il est formellement question des moyens coercitifs qui favorisent l’union mentale avec Brahma, prélude de la délivrance proprement dite :

« Le sage doit maîtriser la voix et le manas ; il doit les maîtriser en les réunissant à la buddhi. Il doit maîtriser la buddhi en la réunissant au mahat (l’âme individuelle). Il doit maîtriser le mahat en le réunissant à l’âtman apaisé (c’est-à-dire à Brahma). »

Et plus loin, vi, 10 :

« Lorsque les cinq connaissances (les sens) sont en repos avec le manas et que la buddhi n’a plus de mouvement, c’est ce qu’on appelle le but suprême. »

Toutefois, c’est dans la Çvetâçvatara Up., ii, 8-13, document d’une époque assez basse, qu’on trouve, pour la première fois dans ce genre d’écrits, une sorte de manuel de l’extase à l’usage des ascètes qui se préparent à la délivrance. Voici la traduction de ce curieux passage :

« Ayant maintenu en état d’immobilité les trois parties supérieures du corps et réuni les sens dans le cœur avec le manas, le sage traverse dans la barque de Brahma tous les courants terribles (il échappe à la transmigration).

Ayant ses mouvements soumis à la discipline (qui vient d’être indiquée), malmenant ses organes vitaux, ayant ses facultés réduites et ne respirant que par les narines, que le sage retienne soigneusement le manas comme un char attelé d’un cheval vicieux.

Qu’il s’unisse (par la pensée à l’âtman suprême) dans un lieu plain, pur, où il n’y ait ni cailloux, ni feu, ni poussière, non plus que du bruit, des eaux et des tentes ; dans une retraite agréable et non pas déplaisante aux yeux, retirée, à l’abri du vent.

Quand on s’applique à obtenir l’union avec l’âtman, diverses apparences préalables de Brahma qui ont pour effet de provoquer ses manifestations (se présentent à l’esprit comme celles) de brouillard, de fumée, de soleil, de vent et de feu, ou bien de khadyota (sorte d’insecte lumineux), d’éclair, de cristal et de lune.

La terre, l’eau, le feu, l’air et l’éther (dont l’homme est composé matériellement) manifestant leurs qualités quand les cinq qualités du yoga (de la discipline indiquée) se manifestent, il n’y a ni maladie, ni vieillesse, ni peine pour celui qui a obtenu au moyen du yoga un corps igné.

Le premier effet de la pratique du yoga consiste, dit-on, dans la ténuité (du corps), l’absence de maladie, l’impassibilité, l’éclat, la