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analyses.spir. Denken und Wirklichkeit.

pouvons fort bien concevoir une existence en dehors du temps. Bien plus, l’idée d’une pareille existence, d’une existence qui n’a pas hors d’elle-même sa raison d’être, est la seule à laquelle nous soyons capables de nous arrêter. L’absolu, dont nous parlons ici, est la même chose que le noumène de Kant. Seulement ce philosophe n’a fait de l’idée de chose en soi qu’une conception problématique et négative, une simple limite, sans autre raison d’être que d’autoriser à renfermer les conceptions fondamentales de l’intelligence, les catégories, dans le domaine de l’intelligence. Gomment alors distinguer la chose en soi du phénomène ? Et cependant Kant lui-même, ça et là, accorde quelque valeur objective à la catégorie de substance.

Mais, pour dégager cette notion d’absolu, il faut prouver : 1° qu’elle est liée aux lois logiques de contradiction ; 2° que les faits en confirment et en garantissent la valeur objective.

La meilleure formule du principe d’identité est celle-ci : En soi, dans son essence vraie et propre, tout objet, tout ce qui est réel, est semblable à soi, identique avec soi-même. Ce n’est pas une tautologie, car on conçoit un monde réel qui serait soumis à un changement constant. De plus, ce principe, sans lequel il serait impossible de distinguer le vrai du faux, ne peut nous être fourni par l’expérience ; car il n’y a d’identique avec soi-même que l’absolu, ce qui existe par soi, et l’on ne saurait en dire autant de ce que l’expérience nous fait connaître. Si elle était conforme au principe d’identité, son contenu l’exprimerait par des propositions identiques, et il n’y aurait pas de propositions synthétiques.

Le principe de contradiction est supérieur au précédent ; il donne une certitude aux appréciations d’ensemble, même à celles qui proviennent de l’expérience par l’induction. Dans la proposition qui l’exprime : « L’affirmation et la négation d’une même chose ne peuvent être vraies toutes les deux », le mot vrai se rapporte à la réalité ; mais il y a des formules plus étendues que la précédente : « La réunion sans condition et sans intermédiaire de ce qui est différent n’est pas possible, » ou bien : « Ce qui est différent n’est pas comme tel une seule et même chose. » Cependant tout le système de Hegel suppose le contraire de cette troisième formule, ainsi que la théorie de l’identification des phénomènes physiques et cérébraux avec les phénomènes psychiques. Nous n’en avons pas moins le droit de regarder cette troisième proposition, qui est plus générale que les deux premières et les contient, comme une loi de la pensée, et par là se fait le passage de la logique à l’ontologie.

De plus, l’union du dissemblable n’étant nulle part inconditionnelle, l’union des dissemblables que l’expérience nous offre n’est pas sans condition. Comme la loi d’identité et la loi de contradiction sont le fondement de la connaissance des corps et qu’elles sont immédiatement certaines, il s’ensuit que l’expérience ne nous montre pas les choses en elles-mêmes dans leur essence propre et absolue. Il y a par suite dans