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dépouille d’une charmante inconscience qui jette comme un voile de poésie discrète sur une partie de leur vie et qui contribue si puissamment à la douceur de leur commerce. Qu’elles aillent à la guerre, puisque guerre il y a, mais qu’elles y aillent le front souriant et la chanson à la bouche, comme les anciens Lacédémoniens ; qu’elles s’apprêtent à leur tâche de citoyenne, d’épouse, de mère, mais qu’elles n’y apportent ni pédanterie, ni gravité affectée, ni une vue trop positive des choses : elles ne rempliront bien leur devoir que si elles y voient plus et mieux qu’une corvée ou une pénitence.

XI

L’immoralité du pessimisme.

Les rares talents de moraliste et de psychologue qui distinguent M. de Hartmann suffisent pour expliquer, sinon pour justifier, les attaques passionnées dont sa personne et ses écrits sont sans cesse l’objet en Allemagne. Tant d’acharnement prouve plus en sa faveur que les pompeux éloges de quelques fanatiques ; Gœthe a bien dit « que ce ne sont pas les fruits les moins savoureux que les guêpes aiment à ronger[1] ». Nous allons reproduire quelques spécimens de cette polémique allemande, dont le ton violent et haineux contraste avec les critiques que la Philosophie de l’inconscient a suscitées en France et en Angleterre. En vérité, M. de Hartmann est bien mal venu de railler l’excessive politesse des Français ; les procédés de ses compatriotes devraient la lui faire mieux apprécier[2].

Les plus courtois sont encore ceux qui ne s’attaquent qu’à la partie spéculative de son œuvre. Leurs expressions ne laissent pas néanmoins d’être caractéristiques. La pensée de Hartmann, au dire de M. J.-G. Fischer, est d’une « bêtise pyramidale » ; il n’a rendu la philosophie de nouveau populaire que pour en faire un objet de risée générale. « Heine dit de quelqu’un : Il est bête comme dix ânes ; ce

  1. Die schlechtsten Frûchte sind es nicht
    Woran die Wespen nagen.

  2. Pour la bibliographie de la « littérature hartmannienne », qui grossit de jour en jour, ou consultera les préfaces des 7e et 8e éditions (allemandes) de la Philosophie de l’inconscient.

    L’Introduction de M. Nolen renferme une excellente revue des principaux ouvrages publiés pour ou contre les doctrines de Hartmann jusqu’en 1875. Les citations qui vont suivre se rapportent en général à des publications plus récentes ; elles sont extraites pour la plupart d’un très-intéressant prospectus dont la librairie Duncker accompagne le nouveau volume du philosophe.