Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VII.djvu/677

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
671
straszewski. — herbart, sa vie et sa philosophie.

Elle ne s’y montre que lorsque nous voulons avoir une explication scientifique de cette idée et la mettre en rapport avec la conception philosophique de l’objet. C’est alors seulement que surgissent des difficultés sérieuses, et, comme la science positive n’est pas en état de les résoudre, elle les abandonne à la métaphysique, dont la tâche consiste précisément à transporter le problème, du terrain positif où elle le trouve, sur un terrain critique, où il pourra être résolu. Nous ne pouvons nous engager dans une analyse détaillée de la méthode métaphysique ; nous dirons seulement que la conception de cette science doit être transformée de manière à considérer comme son but spécial d’écarter les contradictions renfermées dans les principes auxquels aboutissent les sciences positives.

On ne peut nier cependant la grandeur de la position métaphysique de Herbart. La philosophie avait fait jusque-là de vains efforts pour prouver l’existence réelle du monde et connaître l’essence véritable de l’être en soi. Kant lui-même, qui a le mérite incontestable d’avoir posé une définition exacte de l’idée de l’être, échoua encore contre cet écueil dangereux. — Or le raisonnement de Herbart est capable de mettre fin une fois pour toutes à ces démonstrations inutiles. Selon lui, l’existence de l’objet est une position absolue, un fait primitif renfermé dans la nature même de nos sensations. Notre esprit est forcé de l’accepter et de le considérer comme un être parfaitement distinct du sujet. Indiquer une position semblable, c’est rompre définitivement avec l’idéalisme, c’est prouver en même temps que notre savoir, basé sur l’expérience, ne peut être absolu, et que l’être en soi se refuse obstinément à une perception quelconque, l’acte de la perception par lui-même étant déjà quelque chose de relatif. Il s’ensuit que la position métaphysique de Herbart est celle du réalisme critique. Non-seulement, la définition de la philosophie, mais aussi la méthode employée par Herbart, fournit un terrain propice pour la conciliation du raisonnement à priori avec le raisonnement basé sur l’expérience ; mais sa conception de l’être et la manière dont il détermine le rapport mutuel entre le sujet et l’objet y contribuent aussi.

Dans sa métaphysique et dans sa théorie de l’entendement, Herbart penche visiblement du côté du réalisme. Cependant la plus positive de ses opinions, celle qui affirme que les formes des objets nous sont imposées par eux, ne répond pas aux exigences actuelles de la théorie de l’entendement, fondée sur des résultats psychologiques et psycho-physiques. Celle-ci accorde, il est vrai, que les formes des choses nous sont prescrites, mais elle se hâte d’ajouter qu’elles nous sont imposées par la nature de notre organisation