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analyses.franck. Philosophes français et étrangers.

ouvrage de M. Fiorentino, professeur à Bologne, sur Pomponace[1]. Aujourd’hui, il nous fait connaître un autre ouvrage du même auteur sur Telesio et sur l’idée de la nature dans la Renaissance italienne[2]. À la méthode rationnelle à priori, aux formules hardies et tranchantes auxquelles M. Fiorentino soumet plus ou moins arbitrairement l’histoire, on reconnaît un disciple de Hegel. L’antithèse de l’esprit et de la nature caractériserait, suivant lui, toute la philosophie ancienne. La philosophie du moyen âge se résumerait en ce trait unique, qu’elle a cherché toute réalité dans un autre monde, le genre et l’espèce en dehors de l’individu, la matière et la forme en dehors de leur union, l’intellect en dehors de l’âme, la perfection et la vertu en dehors de la vie, et Dieu en dehors des choses. La Renaissance, au contraire, fait tout rentrer dans ce monde. Cela est ingénieux sans doute, mais combien d’objections ne se présentent pas à l’esprit contre l’exactitude de ces brillantes antithèses ! Pour n’en reproduire qu’une seule, le mysticisme, objecte M. Franck, n’a-t-il donc pas existé dans ce que l’auteur appelle improprement la philosophie de la Renaissance, comme s’il y avait eu en effet une philosophie unique de ce nom, et comme si cette période n’avait pas vu éclore et lutter une foule de systèmes opposés ? M. Franck loue l’auteur du savoir et du soin avec lesquels il a recherché et exposé les origines et les principes de la philosophie de Telesio et des lumières nouvelles qu’il nous donne sur sa vie, sur son influence et sur l’Académie cosentine. Il lui reproche le défaut, à peu près commun à tous les auteurs de monographies, d’avoir grandi son personnage outre mesure et de donner à quelques-unes de ses pensées sur la physique une importance et une portée qu’elles n’ont pas. Il est bien loin surtout de partager l’enthousiasme du professeur de Bologne pour la prétendue découverte qu’il attribue à Telesio de l’identification de la sensation et du mouvement, non plus que pour le principe de la conservation de soi-même, érigé en principe suprême de la morale.

De M. Fiorentino, M. Franck passe à un autre historien de la philosophie italienne, M. Ferri, beaucoup moins allemand et hégélien et avec lequel nous avons tous les deux plus d’affinités de méthode et de doctrines. En effet, M. Ferri, d’origine italienne et professeur aujourd’hui à l’université de Rome, a reçu une éducation toute française ; il a été un des meilleurs élèves de notre École normale supérieure et un des meilleurs disciples de notre ami toujours regretté, M. Saisset, auquel il a dédié son Essai sur l’histoire de la philosophie en Italie au xixe siècle. Parmi les ouvrages de M. Ferri, nous mentionnerons aussi un savant mémoire, publié plus récemment en italien, sur un Commentaire du Traité de l'âme d’Aristote nouvellement découvert parmi les

  1. Pietro Pomponazzi, Studi storici su la scttola Bolognese e Padovana ne secolo xvie.
  2. Telesio ossia studi storici su l’idea della natura nel risorgimento italiano, 1872.