Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VIII.djvu/297

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


L’ERREUR ET LA SÉLECTION

(fin)[1]

V

Nous avons vu surtout la lutte pour l’existence entre les causes des faits de conscience dans chaque ordre de faits ; on pourrait examiner aussi la lutte entre ces divers ordres, lutte que je n’ai fait qu’indiquer en passant. L’intelligence est en conflit avec les excitations du dehors quand nous réfléchissons et que les impressions des sens sont à peine perçues ou ne le sont pas du tout, à moins qu’elles ne soient très fortes. Il y a lutte encore entre les sentiments et l’intelligence, entre les sensations et les sentiments, etc. ; mais il serait trop long de développer cela en détail. Un mot seulement sur certaines erreurs. Si l’on considère que l’ignorance est souvent une cause d’erreur et que l’impossibilité où sont les excitations du dehors d’arriver à la conscience est la cause de notre ignorance, et que la cause de cette impossibilité est dans la concurrence que les excitations externes, de quelque nature qu’elles soient d’ailleurs, ont à supporter, on verra là une influence immense de la lutte et de la sélection sur la production de l’erreur, surtout si l’on songe à la puissance merveilleuse que montre l’esprit de l’homme quand il est uniquement dirigé vers un but restreint, comme cela se voit quelquefois dans le somnambulisme.

On peut faire à la loi dont j’ai essayé de montrer les applications dans la sphère physico-psychique beaucoup d’objections plus ou moins fondées. Il est facile d’abord de citer beaucoup de faits dont il serait impossible de donner l’explication. Montrer le pourquoi de certaines hallucinations, montrer le mécanisme de toute conception délirante, de tout acte mauvais, serait sans doute chose absolument impossible aujourd’hui. Il peut paraître trop commode de s’en rapporter aux faits physiologiques inconscients pour expliquer ce que

  1. Voir les deux numéros précédents.