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analyses. — wigand. Der Darwinismus.

supérieurs. On imagine une progression tantôt suivant une seule série, tantôt suivant des séries parallèles ou divergentes. Or la chose n’est point si simple que cela : le progrès existe en gros dans le tout, mais chez l’individu le progrès est souvent accompagné de rétrogradation.

Autre méprise. Des formes inférieures ont quelque analogie avec des formes organiques d’apparition récente ; on en conclut que les premières ont été une étape dans l’évolution de la série. Comme si un palais devait commencer par être une maison bourgeoise !

Admettons pourtant l’hypothèse. Elle implique que les formes inférieures varient suivant une direction ascendante ; or en fait il y a plutôt, dans les limites d’une même espèce, tendance à la simplification. Si l’on dit que dans le combat pour la vie la modification progressive se fixe, parce qu’elle constitue une meilleure adaptation aux conditions biologiques externes, combien de changements expliquera-t-on parla ? Dans le même milieu les espèces les plus basses vivent en compagnie des plus hautes : pourquoi donc s’est produite l’immense différenciation de l’algue au vertébré ?

La moindre avance dans le sens d’une organisation plus élevée, dit Darwin, constitue à la variété modifiée un avantage : c’est ce qui nous explique que, dans les mêmes conditions d’existence, le plus mince progrès de perfectionnement organique soit accru par la sélection. — Vous équivoquez, répond Wigand, sur ce mot de « perfectionnement ï ; il signifie tantôt pour vous une simple amélioration organique, tantôt une progression ou une complication de structure et de forme. Or si l’on comprend bien l’utilité d’une amélioration quelconque au point de vue de la concurrence vitale, la nécessité d’une progression morphologique n’apparaît point, puisque le plus misérable des infusoires est adapté à ses conditions biologiques tout aussi bien qu’un vertébré. Darwin finit en effet par reconnaître que « la sélection naturelle n’implique pas nécessairement un développement progressif ».

L’observation nous montre au contraire partout un mélange de progrès, d’arrêts, de rétrogressions ; chaque organisme, comparé aux autres nous présente la plus grande liberté et la plus étonnante diversité d’évolution. En général, sans doute, les espèces inférieures précèdent les supérieures ; mais souvent, dans tels cas particuliers, les types plus complets apparaissent avant les moins complets. Ainsi les céphalopodes, parmi les malacozoaires, sont antérieurs aux moules et aux gastéropodes ; les fougères ont précédé les mousses. Et même, à comparer les reptiles et les mousses de deux époques, l’actuelle et l’antécédente, on constate une rétrogradation.

Arrivons à la loi biogénétique. Hæckel l’a formulée en ces termes : « L’ontogenèse, ou l’évolution individuelle, est une courte et rapide récapitulation de la phylogenèse ou du développement du groupe correspondant, c’est-à-dire de la chaîne ancestrale de l’individu. » Cette conception des plus ingénieuses nous permet en effet de comprendre comment les formes actuelles sont les produits d’une trans-