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ch. richet. — du somnambulisme provoqué

elles dépend de leur condition pathologique. Quant aux expériences de Braid et de M. Heidenhain, ce n’est pas du somnambulisme proprement dit, mais de l’hypnotisme, ce qui est assez différent. Au lieu d’endormir avec des passes, M. Hansen et M. Heidenhain endorment par la fixation d’un objet brillant, d’une boule de cristal, par exemple. Le sommeil provoqué ainsi est plus complet, et c’est avec peine qu’on peut provoquer alors des hallucinations.

Chez tous ces sujets, l’automatisme est absolu. Il suffit de faire devant eux des gestes, pour qu’aussitôt ils fassent le même geste, sans résister, sans réagir, et aussi, probablement, sans penser. M. de Parville (dans le feuilleton scientifique du Journal des Débats du 5 août 1880) raconte qu’en 1859 il avait hypnotisé des Indiens Mosquitos avec des bouchons de carafe. Ces individus étant hypnotisés imitaient servilement tous ses gestes : « Je courais, ils couraient ; je m’asseyais, ils s’asseyaient ; je m’agenouillais, ils s’agenouillaient ; je levais les bras, ils levaient les bras. » Nous avons suffisamment décrit l’automatisme pour ne pas y revenir. Disons seulement qu’à cette période de profond somnambulisme on observe encore moins de réaction spontanée qu’à la seconde période.

Des observations fort intéressantes sur l’état du système nerveux moteur et la physiologie pathologique des muscles peuvent être faites chez ces somnambules.

On sait qu’à l’état normal un muscle est relié au système nerveux, d’une part par des nerfs moteurs, qui lui envoient le mouvement, d’autre part par des nerfs sensitifs qui, partant du muscle, vont transmettre au centre nerveux certaines notions relatives à l’état de ce muscle. Dans les conditions normales, on admet qu’une série d’impressions extrêmement faibles se transmettent des nerfs sensitifs aux nerfs moteurs du muscle en passant par la moelle épinière (action réflexe, arc sensitivo-moteur). Par là, le muscle est toujours dans un certain état de contraction insensible, ou, comme on dit, de tonicité. Cette tonicité fait qu’un muscles n’est jamais aussi complètement relâché, à l’état normal, que si le nerf moteur de ce muscle avait été coupé ou la moelle épinière détruite.

On sait aussi, depuis les expériences de Setschenoff, de Goltz et d’autres physiologistes, que les centres nerveux supérieurs exercent une action dite d’arrêt, une inhibition sur les mouvements réflexes des parties sous-jacentes de la moelle. Par conséquent, lorsque, sous une influence quelconque, les centres nerveux supérieurs sont paralysés, leur action inhibitoire ne pourra plus s’exercer et les mouvements réflexes des parties sous-jacentes de la moelle seront très exagérés.