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D’ailleurs la condition qui domine toutes les autres, c’est ce que nous avons appelé plus haut l’éducation. Par le seul fait d’avoir été endormi une première fois, on devient très apte à être endormi une seconde fois. Même lorsque une première expérience n’a pas réussi, elle a modifié de telle sorte le tempérament que la seconde expérience pourra réussir. Donc les conséquences de la magnétisation ne sont pas aussi passagères qu’elles le paraissent, puisqu’un changement défini s’est produit dans l’organisme[1]. En réalité, les sujets les plus sensibles au magnétisme sont ceux qui ont été endormis souvent. Ils deviennent même tellement sensibles que les moyens les plus simples réussissent à provoquer chez eux l’état somnambulique.

Il est donc absolument nécessaire, quand on veut étudier les moyens de provoquer le somnambulisme, d’établir une distinction entre les personnes qui n’ont jamais été endormies et celles qui l’ont été déjà. Chez les premières beaucoup de moyens échouent ; chez les autres, tous les moyens réussissent.


Supposons d’abord qu’on veuille expérimenter sur une personne n’ayant jamais été encore endormie. On peut, pour l’endormir, procéder par deux méthodes différentes, soit par l’hypnotisme, soit par les passes.

Pour ce qui est de l’hypnotisme, l’explication est au premier abord assez facile. Les yeux étant fixés sur un objet brillant, l’éclat de cet objet peut produire une excitation prolongée des centres cérébraux qui sont en rapport avec les nerfs optiques. Cette excitation entraînerait la paralysie de la spontanéité intellectuelle, soit par une sorte de fatigue cérébrale, soit, ce qui est plus vraisemblable, par une sorte d’action d’arrêt. L’excitation des centres nerveux visuels se propagerait à certains centres inhibiteurs. Ces centres inhibiteurs entrant en jeu feraient que la cérébration spontanée, volontaire, serait supprimée, l’automate remplaçant le moi.

  1. Je puis citer, comme exemple de cette sensibilité au magnétisme croissant au fur et à mesure que les expériences ont été faites plus souvent, l’exemple de S***, observée par Dupotet et Husson (Expériences publiques sur le magnétisme animal faites à l’Hôtel-Dieu de Paris, 1826). 1re  séance : durée, 30 minutes ; nul effet. — 2e  séance : durée, 30 minutes ; nul effet. — 3e  séance : durée, 45 minutes ; sommeil. — 4e  séance : sommeil au bout de 30 minutes. — 5e  séance : sommeil au bout de 15 minutes. — 6e  séance : sommeil au bout de 15 minutes. — 7e  séance : sommeil au bout de 2 minutes ; etc. — Comment supposer qu’il y ait simulation, puisque tous les observateurs ont vu de pareils faits ? Ceux qui soutiennent cette ridicule hypothèse seraient donc forcés d’admettre que tous les simulateurs simulent le sommeil de plus en plus vite à mesure qu’on a essayé de les endormir plus souvent. — Chez les hystériques l’éducation au somnambulisme est loin de se faire avec la même régularité.