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p. tannery. — l’éducation platonicienne.

plus soupçonnés jusqu’à présent. Si fier, au reste, que puisse être notre siècle de l’édifice qu’il élève patiemment, il ne doit pas oublier qu’une pierre d’attente a été posée, dès l’origine des autres sciences mathématiques, par la découverte des lois numériques qui règlent les accords musicaux. Il se souviendra aussi qu’en ce qui touche la physiologie, nous ne savons guère plus que Pythagore le pourquoi de l’harmonie.

La division pythagoricienne des mathématiques en quatre branches principales, rangées toutefois dans l’ordre adopté par Platon, cette division au fond si juste et si vraie, est devenue classique dès l’antiquité ; elle a persisté pendant tout le moyen âge, dans le Quadrivium, et n’a succombé qu’à la Renaissance, lorsque son cadre, immobilisé par la routine, n’a pu se prêter à l’essor des sciences rajeunies.

L’autre innovation de Platon, le dédoublement de la géométrie, n’a pas eu la même fortune. À la vérité, comme pour répondre à son désir, l’école a adopté le terme spécial de stéréométrie[1] pour cette branche, qu’il semblait indiquer sans lui imposer de nom. Mais le maître a-t-il été bien compris ? avait-il, en réalité, tenu simplement à établir une distinction tranchée entre la géométrie plane et la géométrie dans l’espace, pour observer la gradation dans l’adjonction successive de la deuxième et de la troisième dimension ? C’est au moins une question douteuse.

Dans les éléments de la géométrie de l’espace, nous pouvons distinguer trois parties : 1o les théorèmes relatifs aux constructions ; 2o ceux qui concernent la mesure des volumes ; 3o enfin, la théorie de la sphère.

Ce n’est certainement pas à la première partie que peuvent se rapporter les paroles de Platon[2]. « Cela ne parait pas encore avoir été découvert. — Il y en a deux raisons : l’une, qu’aucune cité ne tenant en honneur ces difficiles recherches, elles sont faiblement poursuivies ; l’autre, que les chercheurs auraient, pour trouver, besoin

  1. Ce terme, qui, dans le langage technique, a désigné de fait les applications pratiques de la géométrie de l’espace, se trouve déjà dans Aristote (Analyt. Post., I, xiii, 13. Mais, si Platon l’a connu, il l’a certainement rejeté, de même qu’il raillait le mot de géométrie, car, pour lui, le but de la science n’est nullement la mesure. Cf. Epinomis, 990 d : Σκώδρα γελοῖον ὄνομα νεωμετρίαν.
  2. Civitas, VII, 528 b : Ἄλλα ταῦτα γε, ὦ Σώκρατες, δοκεῖ οὔπω εὐρῆσθαι. Διττὰ γὰρ, ἢν δ’ ἐγὼ, τὰ αἴτια· ὅτι τε οὐδεμία πολίς ἐντίμως αὐτὰ ἔχει, ἀσθενῶς ζητεῖται χαλεπὰ ὄντα, ἐπιστάτου τε δέονται οἱ ζητοῦντες, ἄνευ οὐ οὐκ εὕροιεν· ὂν πρῶτον μὲν γενέσθαι χαλεπὸν, ἔπειτα καὶ γενομένου, ὡς νῦν ἔχει, οὐκ ἂν πείθοιντο οἱ περὶ ταῦτα ζητητικοὶ, μεγαλοφρονούμενοι. Εἰ δὲ πόλις ὅλη ξυνεπιστατοῖ, ἐντίμως ἄγουσα αὐτὰ, οὐτοί τε ἄν πείθοιντο, καὶ ξυνχῶς τε ἄν καὶ ἐντόνως ζητούμενα ἐκφανῆ γένοιτο κ. τ. ε..