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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/105

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ANALYSES. — WATSON. Kant and English critics.

néant ; infiniment compressible, la matière est cependant impénétrable, mais on voit qu’il s’agit d’un impénétrabilité toute relative. L’impénétrabilité absolue de l’atome, est aux yeux de Kant, une qualité occulte, une pure hypothèse. Chaque partie de la matière, étant douée de force répulsive, peut être séparée des autres parties auxquelles elle résiste et qui la repoussent. Mais chaque partie occupe un espace, et l’espace est divisible à l’infini : la matière est donc aussi divisible à l’infini. Remarquons toutefois que, en déclarant la matière divisible à l’infini, Kant ne veut pas dire qu’elle soit formée d’un nombre infini de parties, comme le soutiennent les dogmatiques. La divisibilité est autre chose que la division. Si l’espace et la matière étaient des choses en soi, nous devrions admettre ou que la matière est composée d’un nombre infini de parties, ou que nous n’en pouvons rien connaître. Mais ils ne sont que des phénomènes, relatifs à la pensée, et par conséquent la matière n’est divisée que jusqu’au point où nous portons la division. De ce que nous pouvons pousser la division à l’infini, il ne s’ensuit pas que la matière renferme actuellement un nombre infini de parties. D’autre part, nous ne pouvons affirmer non plus que la matière est composée de parties irréductibles : car ces parties, n’existant que par rapport à notre conscience, ne peuvent échapper à la loi de pensée suivant laquelle elles nous sont données et qui exige leur divisibilité à l’infini.

La force de répulsion ne suffit pas pour expliquer l’existence de la matière en quantité définie : car il n’y a rien dans cette force qui puisse en marquer la limite, et ce n’est pas non plus l’espace qui pourrait à lui seul en arrêter l’expansion. Seule, une force extérieure pourrait l’empêcher de se disperser à l’infini ; mais cette force de compression ne peut se trouver dans un autre corps matériel, car celui-ci est dans le même cas : il a besoin d’une limite qui en détermine la quantité. Il faut donc reconnaître dans chaque partie de matière à côté de la force répulsive une force d’attraction. Cette double condition est essentielle. Si la force répulsive était seule, la matière se disperserait à l’infini ; elle se réduirait à un point mathématique, si elle ne possédait que la force attractive.

La matière ainsi constituée par ces deux forces contraires, la mécanique détermine le mode suivant lequel elle se meut elle-même ou communique le mouvement. En d’autres termes, elle détermine la relation d’un corps avec un autre considéré comme étant actuellement en mouvement. Les lois du mouvement sont au nombre de trois, correspondant aux trois phases de la catégorie de relation, la substance, la causalité, la réciprocité. — Dans tout changement, la quantité totale de matière demeure la même (loi de subsistance). — Tout corps persiste dans son état de repos ou de mouvement dans la même direction et avec la même vitesse, à moins qu’il ne soit mû par une cause extérieure (loi d’inertie). — L’action et la réaction sont toujours égales (loi d’antagonisme).