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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/161

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RIBOT. — l’anéantissement de la volonté

de la vie. L’ensemble de ces conditions, nécessaires et suffisantes’peut être appelé volonté. Par rapport aux volitions, elle est une cause, bien qu’elle soit elle-même une somme d’effets, une résultante variant avec ses éléments : la pathologie nous l’a démontré.

Ces éléments que j’indique brièvement sont :

1o Les tendances à l’action (ou à l’arrêt) qui résultent des circonstances, du milieu, des conseils, de l’éducation ; en un mot, toutes celles qui sont l’effet de causes extérieures.

2o Le caractère, élément principal, effet de causes intérieures et qui n’est pas une entité, mais la résultante de cette myriade d’états et de tendances infiniment petits de tous les éléments anatomiques qui constituent un certain organisme : en termes plus courts, le caractère est pour nous l’expression psychologique d’un certain corps organisé, tirant de lui sa couleur propre, son ton particulier et sa permanence relative. C’est là l’assise dernière sur laquelle repose la possibilité du vouloir et qui le fait énergique, mou, intermittent, banal, extraordinaire.

Maintenant, si nous considérons la volonté non plus dans ses éléments constituants, mais dans les moments qu’elle parcourt pour se constituer, nous voyons que la volition est le dernier terme d’une évolution progressive dont le réflexe simple est le premier échelon : elle est la forme la plus haute de l’activité — entendue toujours au sens précis de pouvoir de produire des actes, de pouvoir de réaction.

Elle a pour base un legs de générations sans nombre, enregistré dans l’organisme : c’est l’activité automatique primitive, à coordination simple, presque invariable, inconsciente, bien qu’elle ait dû, dans le lointain des siècles, être accompagnée d’un rudiment de conscience qui s’en est retirée, à mesure que la coordination, devenant plus parfaite, s’est organisée dans l’espèce.

Sur cette base s’appuie l’activité consciente et individuelle des appétits, désirs, sentiments, passions, à coordination plus complexe et beaucoup moins stable.

Plus haut, l’activité idéo-motrice, qui, dans ses manifestations extrêmes, atteint une coordination à la fois très ferme et très complexe, c’est la volition complète.

On peut donc dire qu’elle a pour condition fondamentale une coordination hiérarchique, c’est-à-dire qu’il ne suffit pas que des réflexes soit coordonnés avec des réflexes, des désirs avec des désirs, des tendances rationnelles avec des tendances rationnelles ; mais qu’une coordination entre ces différents groupes est nécessaire, — une coordination avec subordination, telle que tout converge vers un point unique : le but à atteindre. Que le lecteur se