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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/204

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rières qu’il semblait vouloir maintenir entre la nature et l’homme : il sent que le mécanisme et la science se confondent, et n’hésite pas à le dire ; nous n’attendions pas moins de sa clairvoyance et de sa sincérité.

II

Nous avons hâte d’arriver au livre de Darwin lui-même. On sait que ce livre est destiné à montrer le rôle considérable que jouent les vers dans la formation de la terre végétale, le nivellement des prairies, l’enfouissement des pierres, la destruction des vieux murs, etc. ; mais, avant d’aborder ce sujet, Darwin a étudié, dans deux très curieux chapitres, les habitudes des vers. Les psychologues empiriques liront avec intérêt le résumé de ce curieux essai de psychologie animale.

Ce qui caractérise la méthode de Darwin, quand il étudie les phénomènes psychiques comme ailleurs, c’est l’emploi des mesures exactes, des moyennes, et l’invention de circonstances artificielles où les facultés mentales des animaux montrent à nu leurs procédés. Là est la supériorité de ses observations ; la psychologie cesse entre ses mains d’être purement descriptive pour devenir vraiment expérimentale.

Mais cette méthode a ses faiblesses. Les divisions de Darwin sont arbitraires ; ou plutôt il ne prend aucun souci de classer les phénomènes qu’il observe. Qu’il y ait ou non une manière de grouper ces phénomènes meilleure qu’une autre, il ne se croit pas autorisé à la rechercher. Cette indifférence se retrouve, si nous ne nous trompons, chez ses disciples ; elle est le propre des zoologistes comme Romanes ; elle ne se rencontre ni chez Spencer, ni chez ceux qui le suivent, psychologues plus ou moins systématiques.

Les divisions doivent nécessairement se simplifier à mesure qu’on descend dans l’échelle animale ; elles restent indispensables, parce qu’il y a, même dans l’activité psychique d’êtres infimes, comme les vers, des fonctions diverses à étudier. Essayons de placer les observations du célèbre naturaliste dans les cadres qui conviennent, ce semble, à toute étude de ce genre, et donnons par là une idée de ce que serait, si le travail était complet, une psychologie du Lombric terrestre.

Milieu. — Les vers de terre sont des animaux terrestres. Mais ils conservent une trace des habitudes aquatiques de la grande classe des annélides, à en ce qu’ils ne peuvent se passer d’humidité. Exposés à l’air sec d’une chambre pendant une nuit, ils meurent. Quelques-uns ont supporté l’immersion complète pendant près de quatre mois (M. Perrier). Ils ont un besoin absolu de terre humide, et c’est pour cela qu’ils abondent dans le sol tassé des sentiers et dans les lieux frais en général, descendant l’été à une grande profondeur. — Le jour, ils restent dans leurs trous, souvent près de l’orifice ; la