Aller au contenu

Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/212

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
202
revue philosophique

Jul. Bergmann. Die Grundprobleme der Logik (Les problèmes fondamentaux de la logique). — In-8o, 1882. E.-S. Mittler et fils, à Berlin.

Il faut convenir que l’on ressent quelque découragement au premier coup d’œil que l’on jette dans ce livre, tout hérissé de symboles et de formules logiques, écrit dans ce style pénible et fatigant, obscur de cette obscurité dont les Allemands ont le secret, avec l’enchevêtrement de phrases interminables, et l’accumulation de ces termes barbares qui ont envahi la langue philosophique, littéraire et même administrative de l’Allemagne. On se trouve en présence de la tournure d’esprit d’un âge passé et qui tranche singulièrement avec la manière nette et claire à laquelle prétendent nos philosophes. — Cependant, si l’on ose en affronter la lecture, on s’aperçoit que la peine n’a pas été stérile, et que de tout cet appareil un peu rébarbatif de jugements et de syllogismes en forme se dégage une idée féconde et fortement développée, sinon entièrement neuve et originale. C’est cette idée que nous voudrions mettre en lumière.

M. Bergmann ne se dissimule pas qu’il est dans un ordre d’idées en complète opposition avec le point de vue philosophique contemporain. Au contraire, il convient avec une certaine fierté qu’il s’est entièrement tenu en dehors du courant philosophique régnant ; il rappelle que le même reproche lui fut adressé déjà lorsque parut sa Reine Logik (1879) ; et il prévient ses contradicteurs que, ainsi qu’en témoigne sa nouvelle publication, toute tentative de lui inspirer du zèle pour un mode de philosopher plus en conformité avec les tendances de notre époque restera sans résultat (Préface, p. iv). A. Comte et H. Spencer sont pour lui comme s’ils n’étaient pas ; il a une seule fois entrepris la lecture de leurs volumineux ouvrages, et il n’en renouvellera certes pas l’essai (id., p. vi).

Il est un autre reproche qui lui tient plus à cœur : on l’a accusé de s’en tenir servilement à l’idéalisme de Fichte. A l’entendre, s’il a emprunté à Fichte le principe fondamental de sa méthode, celui de la thèse, de l’antithèse et de la synthèse, s’il considère Fichte comme devant tenir une place des plus importantes dans l’histoire de la philosophie, son œuvre entière témoigne qu’il s’en est séparé sur plus d’un point. Pas plus que Kant, Fichte n’a dit le dernier mot de la science ; pas plus que lui, il n’a rendu superflu d’aller s’instruire à l’école de Platon, de Descartes, de Spinoza et de Leibnitz. — Nous verrons dans la suite quel compte il faut tenir de ces revendications indignées d’un amour-propre froissé.

L’Introduction détermine nettement l’objet et la division de l’ouvrage.

« La science de la logique, dit M. Bergmann (§ 1), a pour objet les pensées selon leur notion, considérées au point de vue de leur perfection intérieure. » Elle doit étudier les représentations, éléments des jugements (Urtheile, propositions), les jugements, éléments des raisonnements (Schlüsse, syllogismes), enfin les syllogismes eux-mêmes, qui