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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/222

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correspondent à la « réflexion » de Locke, et les idées concrètes et abstraites (de l’espace, du temps, de l’identité, du contraste, de la causalité, de l’homogénité, etc.), qui en surgissent, correspondent aux « formes subjectives de la connaissance » (entre autres aux catégories de l’esprit), découvertes par Kant et indiquées en partie, même avant lui, par différents philosophes. —

Telles sont les principales thèses positives que propose l’auteur de la nouvelle théorie des processus intellectuels, Il y en a d’autres négatives, qui sont fondées sur la critique des anciennes théories de la connaissance : avant tout de l’ancienne théorie des lois générales de la pensée. Toutes ces lois ou tous ces principes de l’identité, de la contradiction, du milieu exclu, de la raison suffisante sont envisagés sous le point de vue de la théorie de l’association et se trouvent être des formes imparfaites et inconscientes, par lesquelles les logiciens exprimaient instinctivement les différentes lois de l’association. Le principe de l’identité n’est juste que si on le considère comme l’expression de la loi « que les sensations ou idées identiques s’associent en raison de leur identité ». De même, le principe de contradiction exprime la loi « que les idées différentes, n’ayant aucun rapport entre elles, se dissocient. » Le principe de la raison suffisante exprime instinctivement la loi « que deux sensations ou idées, dont les objets sont liés extérieurement, dans l’espace, dans le temps, ou comme cause et effet, s’associent en raison de ce lien extérieur, etc. »

L’auteur traite la question des erreurs ; les processus de la pensée elle-même, étant définis par certaines lois organiques immuables, la pensée ne peut pas être erronée : il ne peut y avoir de fautes dans les processus de l’association eux-mêmes. Toutes les erreurs de l’esprit se réduisent à un facteur purement négatif, à l’ignorance, au manque de certaines observations et de certaines connaissances. Mais alors « la théorie de l’art de penser » ne peut avoir pour but que de préserver l’esprit, par des méthodes positives de connaissance, par l’organisation méthodique des processus cognitifs, de cette « ignorance » qui cause à elle seule toutes les erreurs. Cette théorie de l’art de penser ne peut être donc qu’une méthodologie ou une théorie des méthodes. Toutes les autres manières de venir au secours de l’esprit dans son travail, par des règles différentes, concernant l’enchaînement des jugements, ont été fondées sur un malentendu : si les jugements sont justes, la conclusion sera juste aussi, et l’analyse des fautes « dans la manière de lier les jugements » amène l’auteur à ce résultat que ces fautes sont le produit de l’imagination des logiciens : il y a toujours un faux jugement, ayant pour cause l’ignorance des faits naturels, dans les syllogismes qui amènent à de fausses conclusions.

Il faut espérer que cette théorie, ayant pour but de réformer tout leur domaine de la science nommée logique, sera approfondie et étudiée par les logiciens français, ce qui sera leur plus facile quand paraîtra la traduction allemande de l’ouvrage, qui est déjà commencée.

A.