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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/339

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ANALYSES. — MARQUIS DE SEOANE. Philosophie elliptique.

est dans la station, dans « la position droite ou position du maître », démarche que ne possèdent pas même les singes anthropoïdes. « Cette position nous constitue, entre les êtres de notre globe, comme des corps cosmiques ou célestes qui dirigent leur axe, comme les astres, vers un point de l’espace que nous appelons ciel » (I, 58 et 149). Fidèle aux habitudes d’esprit des légistes, l’auteur ne manque pas de jouer ici sur les mots et, non content d’en appeler à la cosmologie de l’avenir pour « démontrer les concomitants de cette position (la station) avec la pression, le vide et la force », il soutient qu’il « appartient à la métaphysique d’en faire autant pour la volonté et l’action, si intimement liées aux sciences sociales et morales, dont l’objet principal est précisément la rectitude » (I, 59).

Non moins fidèle au premier des commandements de la loi quintuple universelle : « Crois en toi-même ! » M. le marquis de Seoane le prend de très haut avec tous les plus grands philosophe anciens et modernes, dont il passe assez dédaigneusement en revue les systèmes dans son deuxième volume. Descartes et Kant lui semblent « avoir plutôt débuté par des vies de saints ou de la théologie que par l’amour de l’ouvrage le plus précieux, la vérité. » Rien n’égale son mépris pour la « logomachie cartésienne ou kantiste ». Longtemps avant Darwin, nous dit-il, en 1848, dans ses Lois naturelles de la politique, il avait conçu et exposé la théorie de l’évolution, mais avec beaucoup plus d’ampleur ! Il se félicite d’ailleurs que, sur beaucoup des points, Darwin « soit d’accord avec lui quant à la procédure de l’évolution ». On n’est pas plus inconscient de ce qu’on dit ou de ce qu’on écrit. M. de Seoane, j’ai regret à le dire, n’a certes jamais eu le loisir de feuilleter un livre de Darwin. Il parle de la doctrine de l’évolution comme fait l’avocat général Ducreux : « Les humains d’aujourd’hui sont, selon Darwin, écrit M. de Seoane, les petits-fils d’un poisson dont nous conserverions encore les ailes (allem. Flügel) dans nos poumons… » (I, 149 ; II, 21). Il nous apprend encore que Darwin a dû hâter la publication de son premier ouvrage, pour ne pas être devancé par Hæckel (II, 102). Hartmann ne trouve grâce un moment devant M. de Seoane que parce que l’Inconscient serait « le principe du latent » opérant, qu’implique, suivant l’auteur, l’ellipticité (au sens grammatical) de toutes nos représentations mentales,

Egalement implacable pour ce qu’il appelle irrévérencieusement c les cousinistes, les éclectiques ou spiritualistes français », voire pour « les néo-éclectiques de Ravaisson et Cie (sic !) » (I, 99 ; II, 34), l’écrivain espagnol ne se montre pitoyable que pour M. Adolphe Franck, pour l’auteur du « seul Dictionnaire des sciences philosophiques qu’il y en ait France ». Dans son effusion, il laisse échapper ce cri du cœur : « En publiant un Dictionnaire des sciences philosophiques, M. Franck a rendu un grand service à la science en général, et surtout aux pays méridionaux, où il y a des difficultés à se procurer des publications nouvelles ! » (II, 34, 125).

N’insistons pas, et surtout n’abusons pas d’un aveu ingénu. À propos