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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/341

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ANALYSES. — G. CESCA. Il nuovo realismo.

Nous renvoyons au volume les lecteurs curieux de trouver une exposition claire et bien faite du réalisme allemand, qu’il soit empirique avec Kirchmann, transcendant avec Hartmann, ou idéal, c’est-à-dire déjà plus voisin de l’idéalisme, avec Ueberweg et Helmoltz. M. Cesca fait suivre d’une critique chacune de ses analyses. Son principal reproche à l’école allemande expérimentale est d’avoir demandé à la seule sensation la preuve de l’existence d’une chose en soi. L’école évolutionniste au contraire, et c’est là le grand mérite de M. Spencer aux yeux de M. Cesca, fait de toutes les formes de l’intelligence un produit de deux facteurs, l’un objectif, expérience, l’autre subjectif, l’unité synthétique de la conscience.

Or dans la quatrième partie de son livre, la plus personnelle, M. Cesca est surtout préoccupé de défendre cette théorie bien connue, d’après laquelle les formes même de l’esprit, innées dans l’individu, grâce à l’hérédité, ne le sont pas dans l’espèce et dérivent en définitive d’une accumulation séculaire d’expériences particulières. Comme les autres, le principe de causalité est à la fois un produit des deux facteurs dont nous avons parlé ; il n’est plus à priori on à posteriori, il est à la fois à priori et à posteriori. Dès qu’il cesse d’être une forme purement subjective, il cesse d’avoir une valeur purement subjective elle aussi : il a une portée objective. Ce nouveau caractère ne lui vient pas d’une prétendue harmonie entre les choses et la pensée, mais de ce fait que l’expérience est an de ses facteurs. Il correspond ainsi à un certain processus objectif qui n’est pas sans doute la causalité, mais qui la devient, si l’on peut ainsi parler, en tant qu’il est représenté dans notre conscience. Nous pouvons désormais appliquer le principe de causalité et soutenir qu’à nos perceptions, qu’à nos sensations quelque chose d’extérieur répond, sans quoi il serait impossible de les expliquer ; qu’il y a enfin une chose en soi ; nous ne nous mettons plus en effet en contradiction avec nos principes, comme le faisait Kant lorsqu’il prétendait, au nom d’une loi de causalité toute subjective, démontrer l’existence des noumènes.

La chose en soi n’est donc pas, comme le veulent les phénoménistes, un produit de notre pensée ; elle en est au contraire une condition, et son existence a la même certitude que celle de notre activité psychique, Nous arrivons à reconnaître l’existence de ce facteur objectif par la seule analyse de nos états de conscience qui sont l’unique chose immédiatement donnée. Ii suffit d’appliquer à l’interprétation de ces états le principe de causalité. Si en effet ce principe est lui-même produit par un facteur objectif, nous devons admettre que dans la chose en soi, à la relation de cause à effet correspond une relation analogue, et par suite nous admettrons encore qu’à ce que nous obtenons en appliquant la loi de causalité correspond quelque chose d’extérieur à nous, c’est-à-dire la chose en soi elle-même.

D’ailleurs, si la chose en soi est la condition objective de l’expérience, si l’affirmation de cette chose et celle de notre propre esprit ont la