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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/497

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bénard. — la vie esthétique

est la dernière des sciences philosophiques, parce qu’elle les suppose. Elle est l’union des deux branches principales, à la fois théorique et pratique.

Tout cela est parfaitement exact, mais avait été dit par les prédécesseurs. Trouverons-nous une doctrine particulière à l’auteur dans sa manière de concevoir l’objet de la vie esthétique ? Cet objet, selon lui, se compose de trois choses. Il y a : 1o le monde des formes ou des images dans leur multiplicité ; 2o le fond ou le contenu esthétique : 3° la forme esthétique.

1o Le premier procédé de l’esprit dans son activité imaginative, c’est l’intuition des formes ou des images que nous offre le spectacle du monde réel. S’absorber dans la considération de ces formes, regarder, voir sans limites, laisser apparaître, dans toute richesse, la variété infinie des formes du monde réel et s’en pénétrer, les évoquer ou les reproduire comme un second trésor semblable au premier, tel est le propre de l’imagination dans son activité primitive ou reproductrice. C’est la vie même de l’imagination (das ist Phantasieleben). Voir des formes, créer des formes, c’est pour l’imagination en opposition avec la pensée, ce qui la distingue et la constitue. C’est ce que veut le sens esthétique ; c’est la disposition esthétique et artistique.

2o Mais la simple multiplicité des images ne suffit pas à l’esprit. Les saisir n’est de l’opération intellectuelle que le début. L’intuition doit conduire à quelque chose de significatif et de durable, qui soit capable de nous inspirer de l’intérêt. Autrement, l’objet nous est indifférent et ne dit rien, il ne peut procurer de satisfaction réelle. Nous attendons autre chose qu’une vide succession d’images, quelque chose qui fixe, retienne et enchaine le regard de l’esprit et qui s’adresse aussi à notre cœur, qui captive l’un et émeuve l’autre. Autrement, cette abstraite liberté n’est qu’un jeu vain, un futile exercice. Ce second terme, qui doit intéresser l’homme tout entier, ce sera le : contenu (Inhalt) esthétique.

Ce contenu, quel est-il ? Ce n’est pas seulement le beau, nous dit M. Köstlin. Les esthéticiens, qui placent l’intérêt dans le beau seul et dans ses formes diverses, qui en font l’unique objet de la contemplation « esthétique, se trompent. Le beau, tel en (particulier que Hegel le définit : la manifestation de l’idée (Erscheinung der Idee), n’est qu’un côté, un aspect de l’objet total. Celui-ci, qu’est-il donc ? M. Köstlin n’a pas autre chose à nous répondre, si ce n’est que l’objet esthétique, c’est ce qui est intéressant (das interessante), ce qui est seulement intéressant et tout ce qui est intéressant. Il faut