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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/574

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Nous ne saurions mieux faire, pour donner une idée de la remarquable étude de M. Wallace, que d’en citer tout au long la conclusion. 1o « D’abord, dit-il, Aristote a le premier constitué la psychologie comme science spéciale. Il a délimité les phénomènes de l’esprit comme sujet d’une histoire particulière ; il a donné une direction déterminée aux études de Socrate sur l’homme en montrant que la connaissance de l’homme implique une connaissance de la nature de l’âme humaine. — 2o Mais, tout en maintenant que la psychologie doit être étudiée comme une science indépendante, Aristote a bien vu que l’étude de l’âme ne peut être conduite avec succès si on la renferme dans celle des manifestations purement humaines de ce principe. En fait, l’âme humaine, pour Aristote, est simplement une phase de la tendance générale que déploie la nature à chaque degré de la vie, la tendance à concentrer l’activité fonctionnelle propre à ce degré dans une certaine forme définie. Et la loi de ces degrés de la vie, c’est, comme il l’a trouvé, une loi de subordination régulière, en sorte que la faculté de penser implique la possession des facultés de sentir, et celles-ci, à leur tour, celle des facultés de nutrition. — 3o Ainsi il a appelé l’attention sur le caractère semi-physiologique et corporel de quelques-uns des phénomènes psychiques ; il a particulièrement insisté sur le côté matériel des sentiments et soutenu que le corps ne devait pas être étudié comme entité abstraite, sans aucun rapport avec l’organisation qui lui est adapté. — 4o Il a reconnu et en même temps supprimé, au moins partiellement, ce dualisme de la nature humaine par sa définition de l’âme considérée comme la réalisation ou la vérité du corps. Bien qu’impuissant à expliquer entièrement l’union des deux termes de l’antithèse, il a montré pourtant que l’esprit et le corps sont moins deux forces contradictoires que deux parties corrélatives de la nature de l’homme. — 5o Mais il ne s’est pas contenté de cette explication abstraite de l’âme humaine, il l’a étendue et éclaircie par l’énumération des différents degrés de développement de cette âme, depuis les formes inférieures jusqu’aux formes supérieures, et, par sa théorie de la relation de ces facultés les unes avec les autres, il a singulièrement dépassé le point de vue où s’était arrêté Platon. — 6o Il a décrit avec succès l’objet, les organes et les opérations des divers sens ; ses analyses du son et de la couleur méritent spécialement d’être remarquées, en ce qu’elle semblent annoncer les découvertes de la science moderne. — 7o Mais il a montré aussi qu’il est nécessaire de s’élever au-dessus des sens pour en expliquer les témoignages. La théorie d’un sens commun ou central, bien qu’elle soit erronée en ce qu’elle attribue au sens ce que par lui-même il est incapable de donner, c’est-à-dire la distinction, la comparaison, l’interprétation des sensations, appelle néanmoins l’attention sur l’insuffisance de tout système exclusivement sensualiste. Et l’unité de la conscience, dont il proclame la nécessité pour l’exercice des sens, conduit, dans une certaine mesure, à l’explication de ce fait que les différentes facultés de l’âme deviennent un moi personnel indivisible. — 8o Cela est rendu plus manifeste