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ANALYSES.e. rabier. Leçons de philosophie.

l’admettre, elle est essentiellement représentative de l’universel, comment pourrait-elle se représenter un rapport quelconque autrement que comme universel ? Et, en fait, c’est ce qui arrive : qui dit rapport veut dire loi et que serait une loi qui ne serait pas universelle ? Un rapport accidentel est un hasard et il n’y a pas de hasard pour la raison.

Le doute ne peut plus porter sur le principe ainsi formé. M. Ribot disait : « En montrant comment le moi se défait nous apprendrons comment il se fait ; » la réciproque est vraie : en voulant montrer comment les principes se forment on apprend à les dissoudre. De là la possibilité du doute dans la thèse de M. Rabier ; de là l’impossibilité de ce même doute dans la théorie d’Aristote. Le principe en effet ne se forme pas, il surgit tout à coup devant l’intelligence au contact de l’appréhension expérimentale du premier rapport causal. Dès que l’esprit a réfléchi sur lui-même, il a saisi son activité et sa raison, et il a transporté à l’univers les lois de sa propre activité. Les événements extérieurs ont pu se conformer ou ne pas se conformer à cette loi, sa certitude n’a été ni augmentée ni amoindrie. Quand ses représentations lui paraîtraient toutes se suivre en désordre, tant qu’il conserverait la nette appréhension de sa réflexion et de son acte pensant, c’est-à-dire, tant qu’il resterait raisonnable, il ne serait nullement troublé.

Nous voyons maintenant où se trouve le point faible de la thèse de M. Rabier. Il a trop accordé à l’empirisme en mettant au compte de l’intelligence les lents accroissements de l’expérience ; c’est ainsi qu’il a exposé au doute et regardé comme hypothétique un principe sans lequel il n’y aurait plus dans le monde non seulement de philosophes, mais d’hommes sensés et qu’il a mérité le reproche de baser l’induction scientifique sur le fondement fragile d’un cercle vicieux. Nous avons vu où il fallait chercher la véritable conciliation entre l’empirisme et l’à priorisme, entre Hume et Kant : c’est dans Aristote et ses grands interprètes d’autrefois. On a remarqué combien la psychologie de M. Rabier se rapprochait en beaucoup de points des théories scolastiques ; dans sa logique formelle il est revenu aux vraies traditions du péripatétisme, il eût gagné à s’en rapprocher encore. C’est là et là seulement, dans les livres immortels du fondateur de la métaphysique et dans ceux qui ont plus tard développé sa pensée, que se trouvent les principes d’après lesquels on peut déterminer avec certitude et équité ce qui revient aux sens et ce qui revient à la raison dans la connaissance et, par suite, ce que l’on doit accorder en morale à l’appétit des sens et aux besoins élevés de la raison.

G. Fonsegrive.

E. Bérillon.De la suggestion envisagée au point de vue pédagogique, Paris, A. Delahaye, 1886, in-8o. 10 p.

Cette brochure contient une courte note présentée par M. le Dr Bérillon au récent congrès de l’Association française pour l’avancement des sciences, à Nancy (section de pédagogie), et le compte rendu analytique