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ANALYSES.f.-e. abbott. Scientific Theism.

II. De cette intelligibilité infinie et de cette intelligence infinie de l’univers qui s’impliquent réciproquement, il suit que celui-ci est un sujet-objet infini, ou une intelligence infinie ayant conscience d’elle-même.

III. La constitution relationnelle immanente de l’univers-objet étant infiniment intelligible, doit être un système de la nature infiniment parfait ; donc :

Elle n’est pas un chaos, car le chaos n’est système à aucun degré ;

Elle n’est pas une pluralité de monades, ou d’atomes, car ce ne serait là qu’un agrégat inintelligible de systèmes ; elle n’est pas une simple machine, car une machine est un système imparfait, qui ne peut ni se conserver ni se reproduire par soi-même.

Elle est un organisme cosmique, car un tel organisme est seul un système absolument parfait.

III. « Le système organique infiniment intelligible et absolument parfait de la nature prouve que l’univers-objet est l’évolution éternelle, organique et téléologique par laquelle se manifeste soi-même l’univers-sujet. Il est la pensée créatrice se réalisant, ou s’accomplissant éternellement elle-même dans l’être créé ; il est la vie infinie de l’univers qui est par soi. »

La théorie de l’évolution est la grande conquête scientifique du siècle. Elle est vraie, mais non au sens mécaniste et matérialiste où l’entendent les Spencer et les Hæckel. Leurs propres principes les réfutent. Ils parlent de tendance à conserver le type des ancêtres (hérédité), de tendance à éliminer les moins aptes pour la lutte de l’existence (sélection) ; comme si le mot tendance n’impliquait pas une téléologie immanente à la nature même et exclusive du pur mécanisme !

IV. « La vie organique et organisatrice infinie de l’univers qui est par soi, prouve qu’il est sagesse infinie et volonté infinie ; béatitude infinie et amour infini, sainteté, bonté, puissance infinies, personne spirituelle infinie, le Dieu vivant et créateur de vie et dont toutes choses procèdent. » Ici la déduction, pour M. Abbott, est un peu plus malaisée. Le panthéisme n’a généralement pas eu de peine à établir l’existence d’une pensée immanente dans l’univers. Le Dieu de Spinoza a un attribut qui ressemble à l’intelligence. La difficulté commence quand il s’agit des attributs moraux et de la personnalité. Spinoza, on le sait, les exclut de la substance. M. Abbott voudrait les conserver, et je ne suis pas bien sûr qu’il y ait réussi. Je ne puis reproduire ici cette partie de sa démonstration. J’apprécie hautement l’ingénieuse délicatesse de sa dialectique sur ce point ; pour la faire apprécier, il faudrait reproduire presque en entier le dernier chapitre de son livre. Ses vues y sont d’ailleurs très sommairement indiquées, et nous espérons que l’auteur leur donnera dans un autre ouvrage tout le développement qu’elles méritent. Marquons seulement, par une dernière citation, en quel sens et dans quelle