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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXIX.djvu/267

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ROBERTY.l’évolution de la philosophie

besoin de le dire ? — est contenue dans la dernière phrase, et la vérité dans celle qui précède.

Citons enfin, à l’appui des idées que nous défendons ici contre Comte lui-même et la majorité des philosophes de notre temps, cette remarque décisive du fondateur du positivisme : « Toutes les grandes modifications de l’esprit religieux ont été déterminées par le développement de l’esprit scientifique. Si l’homme n’avait pas été plus capable de comparer, d’abstraire, de généraliser et de prévoir que ne le sont les singes et les carnassiers, il aurait indéfiniment persisté dans le fétichisme plus ou moins grossier où les retient leur imparfaite organisation ; mais son intelligence est propre à apprécier la similitude des phénomènes, et à reconnaître leur succession… Le passage du fétichisme au polythéisme constitue le premier résultat général de l’esprit d’observation et d’induction, qui s’est développé d’abord chez les hommes supérieurs, et à leur suite dans la multitude[1]. »

Nous croyons avoir réuni ici, avec une impartiale justice, tous les passages un peu saillants dans lesquels Comte se réfute lui-même et laisse entrevoir la possibilité d’une conception plus large et plus vraie de la marche générale du développement de la pensée philosophique.

Ces contradictions, on le voit, ne sont pas nombreuses. Hâtons-nous d’ajouter qu’elles honorent hautement le penseur qui n’a pas craint d’y tomber ; elles prouvent sa bonne foi absolue autant et plus encore peut-être que sa pénétration. Elles ont d’ailleurs été la bonne graine qui n’a pas tardé à germer dans l’esprit des disciples du grand philosophe ; à cet égard, comme à tant d’autres, un sentiment de pieuse reconnaissance nous liera toujours à celui qui fut notre premier maître et le meilleur guide de nos études sociologiques et philosophiques.

Le principal écueil que Comte rencontra sur sa route fut cette pierre d’achoppement de tous les systèmes de notre époque, ce dernier héritage des temps exclusivement théologiques : la théorie de l’inconnaissable. En voici un exemple, pris au hasard dans son Cours entre cent autres. Comte nous apprend que l’illusion consistant à croire que les vérités découvertes par la science sont compatibles avec les explications théologiques (illusion qui a caractérisé tout le moyen âge et une partie des temps modernes), n’a pu se dissiper qu’après que l’esprit scientifique eut fait ressortir « le contraste entre la rationalité des procédés appliqués au but le

  1. Cours, résumé par Rig, II, p. 203.