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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXIX.djvu/375

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UN VIEIL ARGUMENT

EN FAVEUR DE LA MÉTAPHYSIQUE


« L’homme est un animal métaphysique », dit M. Fouillée, en manière de conclusion, dans son récent ouvrage[1] ; et, en somme, c’est notre avis. A y regarder de près, tout le monde est métaphysicien, constamment métaphysicien, même ceux qui s’en défendent le plus vivement. Tout le monde, en effet, croit à des existences indépendantes de la conscience ; tout le monde admet, pour le moins, un monde physique extérieur et des êtres psychiques distincts des représentations que nous en avons. Or ce qui est placé hors de la conscience est aussi placé hors du phénomène ou de l’expérience. « Toute expérience se ramène, en définitive, à une certaine conscience que nous avons. » Au delà, la pensée ne saisit plus rien directement, nous disons même qu’elle ne saisit rien du tout. Si donc la science est limitée à l’expérience, au phénomène, elle ne saurait produire ni justifier la croyance à une réalité, psychique ou physique, située hors de la conscience. Cette croyance relève de la métaphysique. La science reconnaît bien un monde physique et une multiplicité de vies psychiques, mais elle n’est pas autorisée à les placer hors de la conscience. C’est au sein de celle-ci qu’elle doit les distinguer[2]. Comment donc expliquer que personne, en fait, n’observe cette réserve imposée à la science ? Et beaucoup vont plus loin : ils ne craignent pas de déterminer la nature de ce monde extérieur et de marquer ses rapports avec l’ensemble des faits de conscience ; ils affirment même des existences, comme celle de la vie future et celle de Dieu, pour lesquelles il ne se trouve point de modèle dans le monde des phénomènes. Comment le légitimer ? —

  1. L’avenir de la métaphysique fondée sur l’expérience.
  2. Voir notre ouvrage de philosophie générale, le Phénomène. — Nous renvoyons également à cet ouvrage pour la plupart des sujets qui seront en discussion dans la suite de cet article.