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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXIX.djvu/467

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h. lachelier. — la métaphysique de m. wundt

Or l’étude de l’objet donne naissance à deux sciences. L’objet-représentation comprend, en effet, une forme et une matière, qui, bien que toujours inséparablement unies dans la réalité, peuvent facilement être séparées l’une de l’autre par l’abstraction. Aussitôt que cette abstraction a été faite, deux sciences prennent naissance l’une, de la forme : la mathématique, l’autre, de la matière : la physique.

La mathématique. — La distinction de la forme et de la matière s’appuie sur deux sortes de considérations. Nous remarquons d’abord que les éléments formels et les éléments matériels de l’expérience peuvent varier indépendamment les uns des autres. Sans doute la forme ne saurait varier sans que la matière varie également, mais en revanche, la matière peut subir une infinité de modifications qui n’atteignent à aucun degré la forme. Ainsi la couleur d’un corps peut fort bien changer sans que ses propriétés géométriques soient le moins du monde altérées. De même, nous pouvons, dans une même durée, nous représenter les événements les plus différents.

En second lieu, la forme a une constance que ne possède pas la matière. La forme conserve toujours et partout ses mêmes caractères fondamentaux, alors que la matière présente les aspects les plus divers.

Ainsi la portion d’espace dans laquelle est contenue, je suppose, telle ville du nouveau monde est absolument identique à une portion d’espace de même étendue prise dans l’ancien monde. On pourrait remplacer ces deux portions d’espace l’une par l’autre, elles s’adapteraient sans la moindre difficulté aux positions nouvelles qu’on leur donnerait. Il n’en est évidemment pas de même du contenu. Un espace d’une année pris dans l’antiquité a, au point de vue formel, absolument les mêmes caractères qu’une année de l’époque contemporaine, tandis que les événements qui ont rempli ces deux années ne sauraient se confondre. En somme, tandis que la matière est tellement variable qu’il n’y a ni corps, ni événements indiscernables, le temps et l’espace sont partout semblables, disons plus, identiques à eux-mêmes.

M. Wundt pense que l’espace et le temps, ainsi séparés de leur contenu, sont, non pas des intuitions, comme Kant l’a enseigné, mais des concepts. Il n’y a pas, en effet, d’intuition sans matière, et l’espace et le temps sont, par définition, des formes sans matière. On ne se représente donc, ni le temps, ni l’espace pur, on les conçoit. Nous sommes libres, il est vrai, pour faciliter notre étude du temps et de l’espace, de leur donner un contenu sensible, mais nous ne devons jamais oublier que ce contenu n’est pas ce que nous considérons, que