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qui le pousse à réaliser ce type, c’est-à-dire à poser ses représentations comme des objets. Telle est, d’après M. van Weddingen, la base de l’objectivité de la connaissance.

L’auteur s’attache d’abord à montrer que l’esprit est une réalité et qu’il s’atteint lui-même dans son existence intime. Dès lors en effet que l’on sera assuré de la réalité de l’esprit, on sera assuré de l’existence de ses lois ; mais ces lois étant constatées dans la réalité de l’esprit participent à cette réalité et, par suite, si elles nous poussent à poser des réalités extérieures à l’esprit, elles devront avoir la même valeur objective que lorsqu’elles se bornaient à régir la suite intérieure des phénomènes de l’esprit. Tout le travail repose donc sur la conscience et la réflexion. Par de curieuses et savantes citations, l’auteur montre dans S. Thomas le devancier de Descartes, de Leibnitz et de Maine de Biran. L’aperception du moi par la conscience est infaillible et nous donne d’une façon incontestable la réalité d’un être. Servi par une érudition merveilleuse, l’auteur établit que tous les penseurs, à quelque école qu’ils appartiennent, sont d’accord pour accepter sur ce point les données de la conscience.

Quelles sont donc les lois que la réflexion nous découvre comme constitutives de la réalité qui est moi ? C’est d’abord le principe de détermination qui ne se distingue pas de celui de contradiction. L’être que je suis est déterminé, il est lui et non un autre. Il est donc constitué par une synthèse d’attributs, par un ordre immanent. Mais parmi les attributs qui le constituent il y en a un qui le pousse à poser hors de lui des êtres objectifs aussi bien qu’à poser des systèmes d’idées purement subjectives. Il est donc dans l’ordre que l’esprit objective une partie de ses représentations. Il est donc dans l’ordre que l’esprit pose d’autres êtres comme réels. Mais si ces êtres posés comme réels ne l’étaient pas, il serait dans l’ordre qu’après les avoir posés l’esprit les annule, c’est-à-dire qu’il serait dans l’ordre que l’ordre même fût détruit, ce qui est une contradiction.

Nous trouvons encore dans l’analyse de nous-mêmes la loi de causalité efficiente et la loi de causalité finale. Nos phénomènes ont un principe originel et se dirigent vers un but. Nous ne concevons l’ordre dans nos représentations qu’à cette double condition. Mais le groupe de phénomènes que nous sommes ne se suffit pas à lui-même, nous tendons par conséquent à le dépasser et, en vertu même de nos propres lois, nous nous rattachons à une cause efliciente antérieure à nous et à une cause finale où nous sommes adressés.

Bien plus, nous trouvons en nous des instincts, des tendances qui donnent naissance à des mouvements. Mais ces tendances et ces instincts nous poussent invinciblement à sortir de nous-mêmes, à poser hors de nous d’autres réalités qui nous attirent ou nous repoussent, vers lesquelles nous dirigeons nos mouvements. Considérés en eux-mêmes ces instincts sont des tendances infaillibles à compléter l’être, à l’actualiser de plus en plus. Or, notre intelligence a un instinct irrésistible à