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REVUE DES PÉRIODIQUES ÉTRANGERS


Mind.

July-October 1890.

Herbert Spencer. Notre conscience de l’espace : réplique. — La théorie soutenue par l’auteur dans ses « Principes de psychologie », §  326-335, ayant été l’objet de plusieurs critiques, principalement de la part de M. Watson, qui s’est placé au point de vue kantien, il est nécessaire de l’éclairer à nouveau. Toutes les critiques de M. Watson supposent tacitement que la conception de l’espace a toujours été telle qu’elle existe actuellement chez l’homme adulte ; or, c’est justement ce postulat que la théorie de l’évolution rejette : elle ne peut admettre que la pensée est complète dès le début. L’idée de la transformation a beaucoup de peine à entrer dans les esprits, du moins de manière à agir d’une manière efficace sur le mode de penser. Cependant, chaque science nous fournit des exemples de transitions qui, d’une manière insensible, rattachent des choses qui paraissent n’avoir aucune parenté. (Exemples tirés des mathématiques, de la physique, de la chimie, de la psychologie, de la sociologie.) — Pour prendre la question en elle-même, supposons que l’on enfonce une canne dans l’argile. Cette perception simple en apparence est décomposable en deux éléments, toucher et tension musculaire qui par leur fusion constituent un état de conscience tout à fait différent (l’espace), tout comme le sulfure de carbone diffère du soufre et du carbone qui le constituent par leur union. Certes, il nous est impossible de nous débarrasser de notre connaissance de l’espace telle qu’une longue hérédité l’a faite, pour en revenir à la période primordiale ; mais cette perception d’espace, nous pouvons du moins la réduire à un minimum. Supposons que, les yeux bandés, nous soyons introduits dans une chambre inconnue. Tout d’abord nous n’avons que des changements de tension musculaire indéterminés ; mais si nous touchons quelque chose, voici une nouvelle sensation qui limite. (L’auteur expose ici la thèse connue de la série réversible des sensations de tension.) La conscience de l’espace acquise par le toucher est naturellement étendue et transfigurée par l’addition de la vue : la rétine a l’avantage de toucher médiatement une multitude d’objets à la fois. Lorsque la conscience en est arrivée à concevoir