Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome IX, 1880.djvu/123

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


REVUE DES PÉRIODIQUES ÉTRANGERS



VIERTELJAHRSSCHRIFT FUER WISSENSCHAFTLICHE PHILOSOPHIE
1879. N° III.

La livraison s’ouvre par une courte notice, consacrée à la mémoire et à l’œuvre philosophique de Carl Gœring, né en 1841, mort le 2 avril 1879. On doit à Gœring un essai sur Le concept de cause dans la philosophie grecque (Habilitationsschrift) ; un opuscule sur La liberté humaine et la responsabilité (1875) ; enfin les deux premiers volumes du Système delà philosophie critique (1874-75, Leipzig, Veit), œuvre malheureusement inachevée ; et de nombreux articles dans la présente Revue.

C. Gœring : Sur l’abus des mathématiques en philosophie.

L’auteur en signale avec raison dans Descartes et Spinoza les déplorables conséquences ; mais ne va-t-il pas trop loin en faisant de Leibniz le représentant du môme excès ? Il rend justice à la protestation que Kant éleva, dans sa période antécritique, contre la confusion de la méthode des mathématiques avec celle de la philosophie, et prétend que cette sage distinction est oubliée dans les écrits de la période critique. Kant s’est servi de l’exemple des mathématiques pour démontrer l’existence de formes à priori de la pensée ; il a paru ainsi identifier la méthode critique avec celle des mathématiciens et a ouvert la porte aux constructions logiques, aux hypothèses à priori de ses successeurs. — Éclairée par les erreurs de la dialectique transcendante, la philosophie moderne est rentrée dans les voies de l’expérience et a renoncé à emprunter ses modèles à la déduction mathématique. Pourtant Duehring ne doit-il pas autant aux mathématiques qu’à la dialectique hégélienne ses propositions sur l’identité de l’être et de la pensée ? et n’est-ce pas à l’exemple de Gauss qu’il affirme que les mathématiques nous révèlent l’essence des choses ? N’est-ce pas enfin des mathématiques qu’on a fait sortir récemment les hypothèses de la géométrie anti-euclidienne. « Parce que la mathématique considère l’espace comme un concept numérique et dépasse ainsi les limites de l’intuition sensible, on se crut autorisé à traiter de môme l’être et la connaissance. » On devrait reconnaître pourtant que les vérités mathématiques sont des c vérités de fait et rien de plus » ;