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D. F. STRAUSS ET L’IDÉALISME ALLEMAND


La tempête soulevée par le dernier ouvrage de Strauss s’est calmée depuis longtemps. Aussitôt que sa plume acérée ne fut plus à craindre, on jugea ce testament du grand critique avec plus de calme et de modération. Mais ce jugement est en partie très sévère. Nous nous contenterons de citer un seul écrivain bien connu et aimé du public, E. de Hartmann. Sans doute ce philosophe cherche à éviter de mêler sa voix au chœur des contradicteurs et des pamphlétaires qui se sont élevés contre le dernier écrit de Strauss ; il estime trop haut le critique et l’écrivain pour prendre part au tolle général contre la Confession ; mais il a déclaré cependant voir dans cette confession ce que tout homme doué d’une vue pénétrante aurait pu découvrir depuis bien longtemps, à savoir que Strauss n’était pas un vrai philosophe. Quelques Hégéliens seuls ont pu lui donner ce titre, parce que dans sa jeunesse il avait combattu sous le drapeau de l’Hégélianisme. Mais une étude plus exacte de ses écrits a facilement montré que ses rapports avec l’Hégélianisme étaient seulement extérieurs, dictés par la mode du temps ; il n’était pas même besoin de cette preuve frappante qu’il a fournie lui-même dans sa vieillesse en niant l’idéalisme et en se joignant aux zélés défenseurs du Darwinisme. S’il avait réellement eu une vue plus profonde de la philosophie hégélienne, il aurait nécessairement compris d’une façon plus élevée la théorie de la descendance renouvelée par Darwin, et n’aurait pas rejoint, tambour battant, le camp des mécanistes, — tout en y introduisant par contrebande quelques lambeaux de son ancien drapeau idéaliste. Hartmann pense que les idées de Strauss sur le système du monde, si on les examine au point de vue philosophique, manquent absolument d’originalité et de profondeur. Strauss nie tout ce qui est mystique dans la religion et assigne la domination du monde, débarrassé de tout mystère et de tout idéal, aux phénomènes ordinaires et superficiels. Tout, d’après lui, est tellement clair et explicable qu’il ne reste aucun