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DE L’INFLUENCE

DE L’ÉDUCATION ET DE L’IMITATION

DANS LE SOMNAMBULISME PROVOQUÉ


I

Tous ceux qui s’occupent du somnambulisme provoqué connaissent le curieux débat qu’il a fait naître entre l’école de la Salpêtrière et celle de Nancy. Les hypnotisés de l’une ne ressemblent pas aux hypnotisés de l’autre. Les hystériques de la Salpêtrière endormis par M. Charcot et ses élèves passent par trois états bien distincts et bien caractérisés, la léthargie, la catalepsie, le somnambulisme proprement dit, dont voici en peu de mots la description. Lorsque les manœuvres magnétiques, passes, fixation du regard ou d’un point brillant, serrement des pouces, etc., ont amené le sommeil du sujet, ses yeux se ferment, ses paupières sont animées de battements réguliers, ses muscles sont relâchés, et ses membres, devenus souples et inertes, obéissent à la seule action de la pesanteur soulevés, ils retombent d’eux-mêmes, comme ceux d’un cadavre. En outre, « l’hyperesthésie musculaire est tellement développée qu’il est possible de faire, par le simple contact, une exploration musculaire aussi délicate qu’on pourrait le faire au moyen de l’électrisation localisée[1] ». À cet état, on a donné le nom de léthargie.

Pour faire tomber le sujet dans la catalepsie, il suffit de lui ouvrir les yeux. Il existe des procédés qui la suscitent directement et du premier coup, mais nous n’avons pas besoin d’en parler. Ce qui définit la catalepsie, c’est la singulière propriété des membres de conserver la position qu’on leur donne. Le sujet catalepsié est un véritable mannequin, mais un mannequin intelligent, dont les poses se conforment non seulement aux lois de l’équilibre, mais encore à celles de la passion, tout en étant susceptibles de se conserver pendant un temps indéfini. La personne en expérience n’accuse

  1. Iconographie de la Salpêtrière, t.  III, p. 171.