Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXII, 1886.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
148
revue philosophique

Tout autres sont les phénomènes qu’on observe à Nancy. Voici le résumé qu’en donne M. Beaunis :

« … Dès que le sujet est endormi, il est en état de somnambulisme ; les membres conservent la situation que leur donne l’hypnotiseur, et les mouvements qu’il leur imprime se continuent automatiquement.

« Le sujet n’est en rapport qu’avec la personne qui l’a mise en état de somnambulisme, pourvu que le sommeil soit assez profond ; il n’entend que lui et ne répond qu’à lui. Il obéit passivement à son hypnotiseur et à lui seul, et il peut en recevoir des suggestions (hallucinations ou actes) qui se réalisent au réveil.

« Pendant son sommeil, l’hypnotisé se rappelle parfaitement ce qui s’est passé, soit pendant l’état de veille, soit pendant les sommeils provoqués antérieurs ; à son réveil, il a tout à fait oublié ce qui s’est passé pendant le sommeil provoqué.

« Ces caractères essentiels du sommeil provoqué, je les ai constatés chez tous mes sujets ; chez tous, il y a eu ressemblance parfaite sur tous ces points[1] ; les seules différences ont été des différences de degré portant sur le plus ou moins de profondeur du sommeil et sur l’intensité plus ou moins grande de l’état somnambulique.

« À ce propos, je dois dire que je n’ai pas constaté dans les caractères du somnambulisme provoqué de différences réelles entre les sujets hystériques et les sujets non hystériques.

« Je n’ai pu, du reste, pas plus que mes collègues de Nancy, retrouver chez mes sujets les trois états décrits par Charcot et ses élèves chez les hystéro-épileptiques de la Salpêtrière. Je ne veux pas entrer ici dans la discussion de cette question ni essayer d’expliquer la contradiction qui existe entre ces faits et ceux que nous observons journellement. Il y a là le sujet d’une étude qui devra se faire ultérieurement, mais pour laquelle je ne pourrais jusqu’ici apporter que des documents insuffisants[2] ».

Comme on le voit, l’antagonisme entre les deux écoles est complet et porte sur tous les points. L’étude que M. Beaunis n’a peut-

    tant. Par parenthèse, on n’a pu lui reprendre mon portrait que par surprise : la C… n’est guère docile. Je lui présente un verre soi-disant de champagne. Elle voit la mousse, sent le parfum, demande la permission de le boire. Je lui accorde, en la prévenant qu’elle va s’enivrer, elle s’enivre et tombe dans les bras d’un spectateur ; une autre personne la désenivre avec de l’ammoniaque imaginaire.

  1. Non souligné dans le texte.
  2. Recherches expérimentales sur les conditions de l’activité cérébrale, etc. II. Études physiologiques et psychologiques sur le somnambulisme provoqué. Paris, 1886.